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dimanche 10 octobre 2010

La foi, la prière et la patience



17 octobre 2010
29ème  dimanche du Temps ordinaire Année C
La foi, la prière et la patience

Références
 
« Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? », peut-être est-ce la déclaration la plus terrible de tout l’évangile - des quatre versions retenues, -, et de tous les merveilleux développements de Paul et de tous les  autres, à travers les siècles jusqu’à aujourd’hui ! Et Jésus ajoute – on comprend ! -, qu’il faut toujours prier, sans se décourager ».
Si Jésus insiste sur la prière, c’est qu’elle est une épreuve, et, en même temps – voilà le paradoxe -, elle est la seule arme efficace contre l’épreuve de la foi ! Car la foi EST L’épreuve par excellence, s’il en est une !

La prière et la foi ! Voilà l’équation de la vie chrétienne !

Se mettre en prière, c’est certes se tourner vers Dieu et lui dire ce que nous avons sur le cœur. Mais c’est surtout –ce que nous rappellent les traditions des Orients Moyen et Extrême, et que notre mémoire occidentale a oublié depuis Maître Eckhart et les bords du Rhin [1] -, c’est surtout se taire, fermer l’écluse de notre barvardage pseudo charismatique, vider sa tête de toutes ses manigances pour mettre Dieu à l’épreuve de nos exigences et de nos besoins ; se taire et n’avoir aucun a priori de sa volonté et de son mystère ; se taire pour écouter, écouter et écouter encore.




Plus nous avançons dans la vie, plus les épreuves arrivent, et moins nous sommes sûrs de nous et d’un Dieu invisible !  Plus nous croyons en nous, plus nous croyons en Dieu, et plus encore Dieu croit-il en nous, c’est comme une Alliance d’Amour entre nous, c’est vers lui qu’il nous faut nous tourner !
Mais l’inverse est aussi « vrai » ! C’est-à-dire, moins nous croyons en nous, moins nous croyons en Dieu, et nous « croyons » que Dieu croit encore moins en nous !
C’est pourquoi, plus que jamais en ce monde virtuel et informatique, l’invitation de Maître Eckhart se transforme en sommation urgente : déshabitons notre corps et apprenons à recevoir le Dieu d’Elie et de Jésus dans une âme libérée, évidée de tout, et même de l'image que nous nous faisons de Dieu lui-même : tempête, séisme ou incendie ; bouche trou, père fouettard, béquille pour avancer !

Thomas d’Aquin a eu beau enseigner – avec raison, pourtant ! -, que « la prière est le moyen le plus puissant pour la transformation du monde », cela n’empêche pas Jésus, le maître de tous les Thomas – de Didyme à d’Aquin  -,  d’affirmer, selon ce que Luc rapporte de ses investigations: « Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? »

Cela veut dire quoi ?

Eh bien tout d’abord que, si aujourd’hui l’homme Jésus semble être reconnu partout en tant que personnage historique, le Christ de Dieu n’est toujours pas évident à l’homme en général, et à l’homme contemporain en particulier. A fortiori sa présence en nous par la foi !

  1. A qui revient alors la tâche de faciliter la tâche du Christ, sinon à ceux qui sont « appelés » par vocation (redondance : appelés par vocation !) à rendre leur foi visible à Ses yeux (par honnêteté !)et aux yeux des hommes (par témoignage !) 
Par exemple en « épiçant » la Terre à ce grain de moutarde qui dort sur la paillasse de nos espérances délaissées. Est-ce possible ? Comment le savoir sans s’y essayer ?

  1. La foi, par essence invisible, ne peut se voir qu’au déplacement des montagnes qu’elle provoque : mais sans aucun séisme tellurique ! Ces montagnes-là sont autant de chaînes de haine à faire basculer dans des océans d’amour : comment ?
Ø      Par exemple en baignant d’un fleuve de paix le global arsenal absurde que nous entretenons encore : quand allons-nous, tranquillement et communément, le démanteler ?
Ø      Par exemple en transformant durablement l’humanité proche – le voisin -, par la douceur, l’intelligence et l’humour : programme absurde et impossible à réaliser ? Donc, c’est bien le nôtre, à tous et à chacun.

  1. Cette « foi qui déplace les montagnes », (ne) pourrait-elle (pas) déplacer, juste un peu, notre manière de ressentir et d’être?
Ø      Suivant notre réponse à la question, plus besoin de chercher ailleurs !
 
Aimanté par la réalité de notre transformation, le Christ se rapprochera de nous comme nous nous approcherons de lui.
Inconnectable à cause de notre incapacité, le Christ restera lointain comme nous resterons lointains de lui.

  1. La foi est comme un fil électrique invisible, qui parcourt l’univers en nous reliant tous, qu’on le sache ou non, qu’on le ressente ou non : encore faut-il qu’il soit branché ! Et branché sur qui, « croyez »-vous ? La responsabilité en incombe à chacun de nous. Alors
Ø      si la lumière censée circuler à l’intérieur de ce fil, voyage partout, mais si notre foi au Christ qui part à notre recherche, ne rencontre pas la nôtre qui part à la sienne, cela risque de prendre énormément de temps. On le voit depuis… longtemps !
Ø      Trop longtemps à n’en pas douter pour cette pauvre barque de Pierre qui craque de partout et prend déjà l’eau en plusieurs endroits, et qui, comme notre porte avion CdG, passe son temps dans les cales de réparation, à cause de toutes les erreurs de navigation [2] !

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f5/FS_CdG3.jpg   




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Sans peur des conséquences – ou peut-être même pour accélérer le processus de sa mission : avec Jésus, on ne sait jamais ! -, le Galiléen vise les pharisiens de Jérusalem, indirectement mais frontalement, par cette histoire de juge inique (alors qu'il les nommera expressément dans la parabole suivante, celle du pharisien et du publicain en prière). Est inique, celui qui bafoue l’égalité des hommes devant Dieu et devant la loi, comme des hyènes dévorant les maisons des veuves sous prétexte qu'ils priaient pour elles … Quousque ? Jusqu’à quand ? Même pour Dieu qui, dans sa patience (il "use de patience" : makrothumeô), leur laisse cependant, à eux et à tous les autres incrédules, encore du temps pour se repentir. Longanimité, patience à supporter quand on aurait pouvoir de les réprimer !

Où sont les pharisiens aujourd’hui ? Sont-ils si rares par ici... Parce que nous ne souffrons – encore -, actuellement aucune persécution comme Jésus, puis ses disciples, puis les premiers chrétiens, puis l’Eglise naissante… pendant trois siècles…
Peut-être que la prière la plus difficile à faire (Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’il sont !, la dernière prière de Jésus), est celle qu’il faudrait, (d’)après lui, faire pour ses persécuteurs ! Certainement parce que nous aussi , nous ne savons pas toujours ce que nous faisons !
Etienne aussi, sous les pierres qui pleuvaient, eut ce courage !

A la prière et à la foi, le chrétien doit ajouter la patience !

Qui a besoin de la longanimité de Dieu, de sa  "makrothumia" ? Le juge inique ?
La veuve qui lui réclame justice ? Mais en insistant, elle a réussi son coup, même si le juge lui donne satisfaction par exaspération et pour avoir la paix ! Ce qu’il voulait, c’était s’en débarrasser !
C’est comme la moyenne au bac : même sans mention, on s’en fiche ! L’essentiel, c’est de l’avoir !

Qu’est-ce que nous voulons, au fond ? Patience, exaspération ! Pour la veuve, c’est le résultat qui compte ! Le juge s’arrangera avec Dieu ! (Comme un de ces derniers dimanches, le commis débrouillard !)

Ce Dieu, le nôtre, calcule, lui, d’une autre façon :
il semble user et disposer d’une patience inépuisable,
en supportant chez tous leurs faiblesses
et en les aidant – c’est ça la grâce ! -, dans leur marche vers lui
C’est sa patience qui nous sauve parce qu’elle ne désespère jamais de nous !

Mais, quand le Fils de l'homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre? (Luc 18:8)

Quand sera-ce ?

Pourquoi Luc lui fait-il dire cela ? Quelque contemporain l’aura entendu et transmis à l’enquêteur ?
La persécution et/ou la tiédeur – suggère Luc -, pourront-elles avoir raison de cette foi, de cette prière et de cette patience ?

Une vraie interrogation qui glace le sang !

Ø      Quand le feu détruisit Sodome, il ne restait même plus dix justes dans la ville !
Ø      Quand la terre sera consumée par l’effet de serre,  combien restera-t-il de personnes qui auront encore la foi?

Peu de gens peuvent se targuer d'avoir une foi semblable à cette veuve !
Voilà une personne dont les possibilités d'être exaucée par le juge étaient les plus minces. Elle aurait bien pu se dire : Cela ne va rien donner de lui demander de me faire justice, ce juge ne se laissera pas attendrir par ma situation.
Eh bien non ! Elle a tenu à son droit et en persistant, elle a balayé l’indifférence de l’homme de loi, ELLE A TRANSPORTE  LES MONTAGNES !

Il faut croire que c’est ce que Jésus veut que ses disciples fassent : persister jusqu'à ce qu'ils reçoivent ce qu'ils veulent. OU alors, c’est qu’il ne le veulent pas suffisamment : ce sont alors des velléitaires !

Alors : cathos ou chrétiens ?

C’est CETTE FOI-LA qu’il veut trouver quand il vient, aujourd’hui ! 

 


[1] Eckhart von Hochheim, dit Maître Eckhart, (1260 - 1327) est un spirituel, théologien et philosophe dominicain, le premier des mystiques rhénans. - Son enseignement spirituel est formulé à partir d'une invitation à la déshabitation du corps considéré comme moyen (et non terme) nécessaire de l'union à Dieu, et à la réception de Dieu dans le cœur du disciple. La réception de Dieu en l'âme du croyant - âme libérée, évidée de tout même de l'image de Dieu lui-même.
La Trinité descend dans le fond de l'âme (où l'intellect joue un grand rôle) avec toutes ses propriétés, ainsi, rendue à nouveau semblable à Dieu, l'homme connaît une déification, (nommée théosis dans la tradition grecque). Puisque Dieu est présent avec toutes ses qualités, l'engendrement éternel du Fils par le Père dans l'Esprit se produit désormais dans l'âme humaine. L'enfantement de Dieu dans l'âme, climax de la vie chrétienne, est le fruit de la « divinisation » reçue de et par l'union à Dieu

[2] Le Charles-de-Gaulle est l'unique porte-avions de la Marine nationale française actuellement en service, premier et seul navire de surface à propulsion nucléaire construit en Europe occidentale. Après une IPER (indisponibilité pour entretien et réparations) de dix-huit mois (30 juillet 2007-1er décembre 2008), le Charles-de-Gaulle, le 13 mars 2009, alors en phase de remontée en puissance, a de nouveau été contraint d'arrêter ses activités à la mer du fait de l'usure de certaines pièces mécaniques majeures. http://www.defense.gouv.fr/marine/base/breves/l_activite_a_la_mer_du_charles_de_gaulle_suspendue [archive

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