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dimanche 24 octobre 2010

La foi l’espérance et l’amour

La foi l’espérance et l’amour
Lundi 1er Novembre 2010
Toussaint

Textes
·          Ap 7,2-4.9-14.
·          Ps 24(23), 1-2.3-4.5-6.
·          1 Jn 3,1-3.
·          Mt 5,1-12.


Qu’est-ce que la Toussaint pour les hommes ? 

Pour les chrétiens eux-mêmes, que signifie donc cette fête aujourd’hui ?
Sommes-nous tous à la recherche de « réalités d’en haut » ?
Voulons-nous tous le bonheur, et le bonheur véritable ?
Sommes-nous sûrs que ce bonheur se trouve dans « la communion désirable des Saints » ?
Bref : voulons-nous devenir concitoyens des membres de la « Patrie Ultime », des concitoyens des esprits bienheureux ?
Cela en fait des questions, hein ? Car la réalité n’est pas simple qui nous fait aspirer à ce que nous ne percevons que pas l’intelligence de la foi et la tension de l’espérance.



La liturgie de ce jour nous invite à élever le regard de notre âme vers cette foule innombrable, vers ceux-là – disons-nous -, qui se sont efforcés d’accomplir avec amour et fidélité la volonté de Dieu, et qu’aujourd’hui l’Eglise fête, en sa dignité de « mère des saints et épouse mystique du Christ ».

Il saute aux yeux combien tout ce vocabulaire est à peine compréhensible pour des esprits dressés depuis l’enfance – depuis leur première (et dernière) communion ! -, à n’utiliser qu’une langue de 500 à 800 mots, dits « courants », et d’onomatopées, quand ce ne sont pas des abréviations ou des trouvailles argotiques, borborygmées dans des échanges utilitaires et pragmatiques, loin de toute réflexion ou allusion. Oui, où est passé le registre symbolique de la langue qui peut (encore ?) faire accéder le locuteur et le destinataire d’un plan à un autre plan, « d’un ordre à un autre », comme dirait Pascal ? Comment désormais dire avec lui, aujourd’hui, en français contemporain :

La distance infinie des corps aux esprits figure la distance infiniment plus infinie des esprits à la charité car elle est surnaturelle….
Les saints ont leur empire, leur éclat, leur victoire, leur lustre et n'ont nul besoin de grandeurs charnelles ou spirituelles, où elles n'ont nul rapport, car elles n'y ajoutent ni ôtent. Ils sont vus de Dieu et des anges, et non des corps ni des esprits curieux : Dieu leur suffit…
Il eût été inutile à Notre Seigneur Jésus-Christ, pour éclater dans son règne de sainteté, de venir en roi ; mais il y est bien venu dans l'éclat de son ordre !....
Tous les corps ensemble, et tous les esprits ensemble, et toutes leurs productions, ne valent pas le moindre mouvement de charité. Cela est d'un ordre infiniment plus
élevé.



De tous les corps ensemble, on ne saurait en faire réussir une petite pensée : cela est impossible, et d'un autre ordre. De tous les corps et esprits, on n'en saurait tirer un mouvement de vraie charité, cela est impossible, d'un autre ordre, surnaturel[1].

Jean donne des raisons de cette difficulté, voire de cette impossibilité :

  • Le monde ne peut pas « comprendre » puisqu'il n'a pas découvert Dieu.
    Nous sommes bien enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement.
  • Nous croyons cependant que,
  • lorsque le Fils de Dieu paraîtra,
  • nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est.

La sainteté semble exiger un travail constant de l’intelligence sur mystère de la foi, et s’il faut affirmer qu’elle est à la portée de tous  (qu’elle est catholique, universelle, globale…), il est tout aussi nécessaire de nommer quelques pistes susceptibles d’y faire accéder.
La plus pragmatique et sensible qui nous est proposée aujourd’hui, c’est celle de Matthieu. Elle est de l’ordre de l’action et du ressenti, et non pas seulement celle du silence de la méditation et du recueillement ni de la prière orale de louange !

Pour rendre ce Royaume des Cieux possible et crédible, les soit disantes béatitudes seraient donc en quelque sorte le ‘Décalogue du Nouveau Contrat’. Car Matthieu fait proclamer à Jésus un type très particulier de bonheur : 
« Heureux les pauvres, heureux les doux, etc. » !
Et cette déclaration s’adresse à chacun personnellement :
« Toi, tu seras heureux si tel ou tel signe du Royaume en question se fait sentir dans ton cœur et te pousse à agir en conséquence ! ».

Le paradoxe – le scandale, même, et, de plus, à notre plus grande surprise !-, le bonheur de cette ère annoncée, est presque toujours lié à quelque disgrâce physique ou morale : la pauvreté, les larmes, la faim et la soif, les persécutions et j’en passe.
Heureux besoin, heureuse faim et heureuse soif, ce dont Jésus se/nous félicite d’ailleurs !
A y voir de près, c’est comme si ce Nouveau Régime ne se laissait entrevoir qu’à travers un certain vide de l’existence humaine, un vide qui en attente d’être comblé. Est-ce à dire que la sainteté (doive) passe(r) par une faim et une soif, une  quête, une recherche jamais abouties de la « vérité » dans la pratique du « bien » ?
Notre psaume 24 nous donne un profil de cet ‘homme saint’, de cet ‘homme heureux’, en  décrivant un type humain qui a du procéder à un ‘vidage existentiel’, à une purification du sens de son sentiment et de son être : il l’appelle ‘L'homme au cœur pur’ (le seul capable de ‘voir’ Dieu !), ‘l’homme aux mains ‘propres’, ‘l’homme droit’ : quelqu’un – résume-t-il -, qui ne livre pas son âme aux idoles. Ce doit être ça : et en conséquence, décidé à ne pas sacrifier aux idoles de l’argent, du pouvoir et du sexe, il est ‘programmé’ qu’il connaisse - tour à tour ou tout ensemble -, pauvreté, larmes,  faim et soif, et persécutions de toutes sortes !
*       *
*
Ainsi, affirmer et chanter aujourd’hui que, oui, nous voulons être le peuple immense de ceux qui cherchent Dieu, n’implique aucunement que nous sachions clairement en quoi cela consiste ! Paradoxal, non ?
  • Nous croyons bien que nous sommes enfants de Dieu,
  • mais c’est dire surtout que nous croyons en l’immense amour dont Dieu nous a comblés
  • pour parvenir à la plénitude de notre être (voir le programme),
  • pour parvenir au bonheur tant recherché en Dieu (voir encore le programme),
  • pour suivre un chemin qui fonde notre espérance en Jésus
  • et devenir ainsi assez semblables à lui pour le voir et nous voir enfin,
  • tels que nous sommes, lui et nous !

On comprend que c’est l’espérance qui nous rend ‘purs’, que c’est en nous abandonnant à son amour que nous trouver(i)ons bonheur et paix pour combler notre désir !



[1] Pascal, Pensées, n° 72 et n° 793 dans l'éd. Brunschvicg.


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