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mardi 31 août 2010

LE CHOIX PREMIER

5 septembre 2010

Vingt-troisième dimanche du Temps ordinaire Année C

JÉSUS : CHOIX PREMIER

Lectures:
Sagesse 9, 13-18
Psaume 89
Philémon 9.,.17
Luc 14, 25-33

Les prises de conscience tissent le fil rouge de nos dimanches d'été. Maximes et proverbes balisent l’aujourd’hui et le lendemain du chercheur de Dieu. Sirac nous enseignait la vérité sur nous-même, voici maintenant la Sagesse soi-même qui nous invite à découvrir ce que nous ne pourrons jamais connaître par nous-mêmes : les intentions mêmes de Dieu.



L'Esprit seul sait corriger et caler nos feuilles de route dans la perspective de Dieu, dont la sagesse est aussi l’un des noms. Comme lui, magnifiques et sereins, nous avançons sur un chemin balisé qui remet les choses à leur place. Et en ce dimanche, c’est la liberté de l’autre que le projecteur désigne. L’autre – quel qu’il soit -, vers lequel la fascination et l’obsession morbides de la peur et du mal sont capables de nous entraîner pour nous ‘venger’ de ce qui nous ‘arrive’, et pour quoi il nous faut un responsable, voire un coupable ! Il est des esclavages dans lesquels nous entretenons ceux qui nous entourent – sans le savoir ni sans le vouloir - jusqu’à les pousser au suicide moral, mental, social et parfois physique.

La compagne d’un jeune suicidé me confiait ces jours l’emprise maternelle sur son ami qui ne trouva d’issue qu’en sortant de la vie… ‘Fatalitas’ ?

La « juste place d'Onésime n’est plus celle d’un esclave mais bien mieux, c’est celle d’un frère bien-aimé » ! Pourquoi donc Jésus serait-il devenu notre frère humain, sinon pour détourner souverainement la trajectoire fatale du mal rongeur de la tolérance, de la justice et finalement de l’amour ?

Le reproche que l’on fait à Paul et à l'Église de n’avoir pas, en leur temps, condamné explicitement l'esclavage, relève de la bêtise. Cela équivaut à reprocher aux médecins de Louis XIV d’avoir cru aux bienfaits de la saignée, alors que le roi mettra 3 semaines atroces à mourir d’une gangrène à l’os !

Qui sera jamais contemporain du futur : on a déjà tant de peine à l’être de son propre temps !

Toutes les formes d'esclavage sont condamnables, mais diversement et en vertu seule de ce que l’on décrète esclavage ! Cela va des petits ouvriers de Nike des pays émergents à 1$ par jour, aux escort girls et boys de luxe des sordides capitales du sexe, Rome y compris ! Ce dont on nous parle ici, c’est l’esclavage loin de Dieu, loin de la liberté de l’amour et de l’amour de la liberté. Ce que le vocabulaire chrétien a ‘baptisé’ péché.



Jésus,
devenant homme en tout, hormis le péché,
nous en délivre par sa propre mort et son propre retour à la vie :
ainsi
la mort, c’est-à-dire la conséquence du péché,
est désormais vaincue
par l’amour de Dieu, c’est-à-dire la vie sans fin.

L'histoire de toutes les civilisations nous enseigne que l'esclavage et l'aliénation, comme les guerres de domination ou d'extermination, sont la figure la plus lisible du péché du monde : il existe ‘quelque part’ en l’homme, une espèce de structure de péché, un mystérieux ‘cancer du mal’. Laissons philosophes et théologiens en discourir, si cela leur fait du bien : appliquons-nous plutôt avec les anthropologues à chercher en l’homme même les sources de cette sécrétion maligne qu’engendrent, avec une déconcertante et désespérante inévitabilité, ses plus belles réalisations.

Car c'est vraiment, Seigneur, le meilleur témoignage
Que nous puissions donner de notre dignité
Que cet ardent sanglot qui roule d'âge en âge
Et vient mourir au bord de votre éternité!

Baudelaire, Les Phares (dernier quatrain)




La victoire du Christ se réalise dans la foi, où il n'y a ni maître ni esclave ! Quoi qu’on fasse dire à Hegel et à sa théorie du maître et de l’esclave !

Car si l'existence d'autrui est indispensable à l'existence du moi,
[et ce pour une double raison qui veut:
- que le moi n'ait de sens qu'en tant qu'il n'est pas autrui,
- et que la connaissance de soi requière la reconnaissance de soi par l'autre]
c’est que cela ne peut se faire que dans la confrontation entre
* quelqu’un qui est conscience de soi, et ne l'est pleinement que parce que l'autre l'a reconnu ;
* et quelqu’un qui a éprouvé le danger de cette relation et la disparition possible de son existence fragile, et, ce faisant, prend, lui aussi et par là même, conscience de lui-même.
Cela veut ‘simplement’ dire, dans les deux situations, que la conscience de soi passe par autrui.


Dans sa confrontation avec le mal objectif et générique (la souffrance et la mort) et avec le mal subjectif et personnel (les ’tentations’ au désert), Jésus a éprouvé, dans sa chair et dans son esprit, le danger de cette relation et la disparition possible de son existence fragile, en tant qu’homme et que tout homme ; et, ce faisant, il prit, lui aussi et par là même, conscience de lui-même, en tant qu’homme, et que tout homme, promis à autre chose que l’aliénation, en ‘succombant’ à la tentation du mal.



Vainqueur de ce mal possible, il ouvre la voie possible d’une vie délivrée de ce mal. C’est ce que veulent dire les rédacteurs du testament nouveau : l’Évangile nous délivre de la fascination du mal suprême qui est que l'être humain peut faire d'un autre être humain un objet, sa chose avec droit de vie et de mort. C'est exactement là que l'homme prendrait la place de Dieu ! Par la victoire sur et de la croix - châtiment des esclaves -, l’Onésime de Paul est devenu pour son maître - devenu lui-même chrétien -, un frère bien-aimé. Voilà, en acte, la révolution de l'amour que propose Paul - révolution jamais finie, puisque l'humanité a le génie mauvais d’inventer sans cesse de nouveaux esclavages et de nouvelles aliénations. L'Église elle-même y a été et y est encore sujette, et doit, comme toute humanité, rester vigilante pour annoncer à temps et à contretemps - et malgré ses contre témoignages -, cette vraie révolution-là.

Au fond, Jésus dénonce par sa vie, sa mort et sa résurrection, la fascination de la violence par laquelle l'humanité s'autodétruit : une sorte de fascination de l’échec total, une pulsion de mort, une psychose thanatologique ! Chacun veut dominer chacun, l'autre n'est plus un frère, mais un ennemi qui peut, un jour, détruire mon pouvoir ou prendre ma place : violence interne de l'humanité. Il faut éliminer celui qui prétend que le vrai bonheur existe et qu’il en connaît le chemin ! L’amour est une faiblesse pour les ‘forts en gueule et en fric’, qui savent, eux, ‘parler vrai’ et commander aux foules !

La croix demeure un choix délibéré de Dieu, non pour un amour sadique de la souffrance comme telle, mais pour administrer une preuve réelle du cœur de l'homme, capable de tuer l'Innocent quand l'homme prend la place de Dieu. L'Évangile, mémoire vivante de la vie de Jésus, nous révèle tout autant qui est Dieu et qui est l'homme. L'Innocent révèle le coupable, meurtrier capable de tuer l'autre pour protéger son avantage. La croix révèle à l'humanité sa propre violence.

Le renoncement suggéré par l'Évangile n'a donc rien à voir avec un championnat de mortification. L'austérité, voire l'ascèse, peuvent n’être que l’autoglorification de tous les imposteurs de la terre. Le renoncement chrétien refuse toute fascination qui dérive vers l’envie d'avoir toujours plus, vers une folie oublieuse de notre condition, vers une paranoïa meurtrière du plus faible ! Ce renoncement ne peut se faire à la force du poignet : il n'est possible que dans la grâce d'une conversion permanente de l’esprit et du cœur. A force d’autosatisfaction, l'homme religieux lui-même peut en ariver à détourner de Dieu.



Il faut ‘aimer’ (pour) ‘renoncer’!
- Porter sa croix n'est pas un culte sadomasochiste : c'est faire nôtre une victoire ‘à la Christ‘ qui renonce à crucifier les autres, et à faire de l'autre un ennemi à détruire.
- Porter sa croix, c'est tracer une route possible pour l’amour, malgré tout !
- Bref, porter sa croix, c'est rester debout (Stabat !) au pied des croix du monde, et de celles que nous dressons malgré nous, et de ne pas désespérer de soi, ni de l’homme !

Le vrai choix est de traiter avec l'Esprit Saint. Négociation, pas renoncement à sa personnalité ! La grandeur de Dieu n’a jamais exigé l'écrasement de l'homme : l’Eglise aura à répondre, pour sa part, de l'athéisme contemporain. Car l’homme est toujours capable du meilleur quand il commence à renoncer au pire.

L'homme spirituel, selon l’évangile, ne cherche pas à dominer les autres par son savoir, son avoir ou son pouvoir : l'homme renouvelé rend présent le Christ qu’il est devenu lui-même, en se recentrant sur son témoignage. Voilà pourquoi le chrétien préfère Jésus, pour qui il n'y a ni homme, ni femme, ni juif, ni Grec, ni maître, ni esclave (Ga 3, 26-29). Etre son disciple, au jour le jour, c’est devenir frère des frères !

jeudi 26 août 2010

La rupture : enfin / bientôt ?!

La rupture : enfin / bientôt ?!

Ou

Comment transformer ses adversaires en ennemis

Il s’agit de se définir[1] :
-          l’électorat catholique de droite, d'une part,
-          et la tradition de l'Eglise catholique française et sa conception de l’immigration, notamment depuis Vatican II, d'autre part.
Ø      L’Eglise catholique a toujours pratiqué et théorisé, au regard de la Parole de Dieu, l’accueil de l’étranger, de la veuve et de l’orphelin.
Ø      De ce fait, elle refuse toute politique discriminatoire. Pour elle, il s'agit d'un non-respect du 1er  commandement biblique (amour du prochain) et du 1er commandement évangélique (amour de celui qui est différent, voire même de l’ennemi)[2].

Ainsi dans les années 1970-80, l’Eglise a réfléchi à ce qu'est la France : une grande terre d’immigration : « La crise commence à être surmontée lorsque l'identité chrétienne ne se réalise pas à côté de la vie humaine responsable[3] ».
Ø      Y arriverions-nous, enfin ?

C'est pourquoi il existe des « pastorales » - des politiques défendues par des prêtres - notamment sur l’immigration au niveau du diocèse, mais aussi au niveau des paroisses, ouvertes aux migrants. L’accueil de l’étranger se décline au niveau des différentes instances catholiques.




Pour l'Eglise catholique, puisque l’accueil de l’étranger est garanti par la Parole de Dieu, elle a le devoir de l’accueillir concrètement (en acte et en vérité[4]).

Contre les lois Pasqua en 1986, Louis-Marie Billé, archevêque de Lyon, avait jadis rédigé des textes très réprobateurs sur la politique migratoire du gouvernement de l'époque et les lois Pasqua.

Il existe une vraie tradition :
l'étranger c’est le symbole de Dieu, Abraham c’est le Rom, l’arabe …
Pour l'Eglise catholique, la foi est un pèlerinage. C’est un argument spirituel et théologique :
on est en chemin, on est en recherche. A ce titre là, on ne peut exclure personne.

Le président a commis une erreur, fatale - doit-on / peut-on espérer ? L’Eglise Catholique ne va pas changer pour autant. Nous assistons à une fêlure, qui, lentement mais sûrement, progresse et empire jusqu’à se transformer en une fracture entre un électorat de droite libéral et un électorat de droite catholique, particulièrement sur trois thèmes :

prison, étranger, pauvreté.
Sur ces points, les électeurs catholiques de droite ont davantage de points communs avec des gens de centre gauche qu’avec des gens de droite.
Sur ces sujets, il y a un désaccord de fond car il s'agit d'un désaccord de foi[5].

Quand un gouvernement s’attaque à une des trois grandes figures de l’Eglise catholique (le prêtre, l’étranger, la famille), il y a pour le moins dissension.
  1. NS n'a pas de politique familiale (ou alors oui, en pratiquant le modèle de la famille doublement, ou triplement recomposée, selon de décomptage !) ; 
  2. la figure du prêtre a été mise à mal avec les derniers scandales (pédophilie), même si ce n'est pas la faute de « la France » ;
  3. mais, et enfin, concernant l’étranger, NS s'est vraiment trop rapproché d'une certaine attitude et d’un certain discours proche de l’extrême droite.

Par ailleurs - argument ad hominem, mais comment distinguer entre « les deux corps du roi »[6] ? -, la privatisation, la peopolisation à laquelle s'est livré le chef de l’Etat va de pair avec le capitalisme alors que l’électorat catholique de droite n’est pas capitaliste ; même s'il est libéral. Le chef de l'Etat doit être "institué", alors que NS s'en prend au signifiant –l'amour de l'autre- et au signifié –la fonction. Comment l’homme Sarkozy pourrait-il correspondre au message catholique ? Mais comprend-il seulement ce dont il s’agit, même quand « peopolement », il se fait des gorges chaudes avec son canonicat diplomatique de Saint Jean de Latran (2007), plus saugrenu encore que son co’principat d’Andorre !
Ø      Lorsqu'un chef d’Etat n’incarne plus la condition du chef de l’Etat et que l’institution n’est plus respectée, clairement on se sépare.

·         La toile de fond est tout aussi claire :
-          dans une société laïque l’Eglise et l’Etat sont séparés : bon !
-          mais l’Etat ne peut pas édicter une morale, encore moins des normes religieuses[7].
·         Cependant, il y a un autre élément qui est la société avec des individus qui ont, eux, une morale.
ü      C'est pourquoi, quand l’Etat vote des lois, elles ont inévitablement une portée morale et éthique sur la société (bioéthique, immigration...).
ü      L’Etat ne peut plus faire sans les réflexions morales et politiques : ce sont les individus qui élisent l’Etat en fonction de leurs valeurs. Le gouvernement ne peut pas ignorer les valeurs des individus même si elles ne constituent le cœur ni de la constitution de l’Etat, ni des siennes  propres.
Ø      Il y a TOUJOURS (et plus que jamais) un débat des valeurs !

Depuis les années 1980, God is back : il y a un retour des Eglises ! Tout le monde est d’accord : l’Etat est neutre certes, mais il faut tout de même conseiller l’Etat.



Finalement – tactique houdinesque[8] ou conviction inconsciente[9] -, NS a été plus loin encore puisque c'est lui qui a créé le concept de laïcité positive[10]. Cela signifie que les institutions conseillent mais elles peuvent aussi intervenir, coopérer : mal lui en a pris !

Ce qui se passe depuis quelques semaines constitue un retour de bâton, un lash back. En effet, l’Eglise catholique intervient (enfin !), mais cette coopération comprend des désaccords possibles et l’expression de ces désaccords. De plus – « manque de pot » -, concernant les Roms, le gouvernement touche à des étrangers qui, de plus, sont pour beaucoup chrétiens, c’est dire qu'il attaque l’un des fondements du coopérateur, l'Eglise : et quand on s’appelle Rom !!!

Les paris sont ouverts si la rupture avec l'électorat catholique de droite est/était effectivement consommée[11] !!!
*     *

*
En matière[12] de sécurité, d'immigration et de nation, l’expérience quotidienne montre que les hommes sont naturellement racistes et qu'ils ont du mal à supporter le différent.  A notre nature mauvaise, il faut opposer - avec une infinie patience (Dieu seul !) -, une culture de la coexistence : ni la répression aveugle ni l'indignation incantatoire ne sauraient la réduire, cette nature. Ce genre (de démon) n'est chassé que par la prière et le jeûne. Mt 17, 21

La tergiversation – qui est l’erreur fatale de toute stratégie politique -, en retardant la dénonciation de vérités qu'il aurait fallu avoir le courage de formuler en leur temps, sans se demander à chaque instant si l'on sert ou si l'on dessert un homme politique ou un clan, … sa tergiversation a privé NS soi-même de l'autorité indispensable pour faire comprendre et faire accepter NOW de telles vérités :

  1. Des Roms sont maltraités en Roumanie ? Alors gardons-les chez nous !
  2. Il y a parmi eux de dangereux trafiquants de drogue ? Soumettons-les aux implacables rigueurs de la loi !

A la place qu’entend-on ? Des relents refoulés des cloaques de l’histoire récente !

Emergence d'une violence organisée qui émanerait  de groupes composés de
« Français  de fraîche date » !

Car c'est ainsi qu'on les désigne dans les conversations, dans les sketches des humoristes, et dans les rapports des préfets ! Va encore pour ces « hommes de la rue » ! Mais cette approximation sémantique est absolument interdite à un seul homme : le chef de l'Etat ! Ou alors…

Il ne peut cautionner de discrimination - fût-elle positive ! - entre les citoyens,
selon leur origine, leur race ou leur religion.
Un point, c’est tout !

Que Brice Hortefeux et Christian Estrosi se distinguent dans ce triste exercice, passe : ils ne comptent pas, même s’ils sont « respectivement » (!) l’un ministre de l'Intérieur, à quoi l'autre, apparemment, aspire. Et si les deux passent pour très proches de la « pensée » du chef de l'Etat…, cela en dit long sur les dérives actuelles!
*     *

*

La vague qui gonfle de tous les marécages de la planète, c’est celle de la grande imposture globalisée : aucun rivage où elle s’échoue n’est épargné ! Et les motivations les plus solennellement invoquées pour toutes les croisades – de St Dominique et St Bernard à Donald Rumsfeld et Colin Powell -, constituent hier comme aujourd’hui, les grands mensonges de l'histoire. 




Au nom de l'utopie la plus idéologique sur les vertus contagieuses de la démocratie et la religion : il y aura toujours d'éminents intellectuels pour s'embrigader au service de leur justification.

Cannes, jeudi 26 août 2010


[1] Inspiré d’un [INTERVIEW] La politique sécuritaire de Sarkozy, une rupture avec son électorat catholique ? Olivier Bobineau, chercheur au groupe Sociétés-Religions-Laïcités, maitre de conférences à l'Institut catholique et à Science-Po Paris. - Cycle de cours à l'Institut catholique de Paris intitule Religion, laicite et interculturalite dirigé par Olivier Bobineau. Sipa
[2] Un docteur de la loi posa une question à Jésus pour le mettre à l'épreuve : " Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? " Jésus lui répondit : " Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Voici le grand, le premier commandement. Et voici le second, qui lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Tout ce qu'il y a dans l'Ecriture - dans la Loi et les prophètes - dépend de ces deux commandements. " Mt 22, 35-40
[3] Guillet C.-M., La crise du clergé en France (1970-1980). Vocation-Formation. Quelques remarques très partielles à partir d'une expérience de 30années : « Témoignage d'un prêtre séculier, professeur de grand séminaire (1950-1970), maintenant au service de la formation permanente : il juge qu'il y a un vrai problème ; ses causes: inadéquation de la formation avant 1960, fin d'une chrétienté, expérience menée de 1963 à 1970 et venue "trop tôt". Le repli actuel ne fait que masquer la réalité et manifeste un certain découragement, intellectuel et pastoral, du clergé. D'après des expériences vécues, la crise commence à être surmontée lorsque l'identité chrétienne ne se réalise pas à côté de la vie humaine responsable, à côté du monde adulte, à côté du baptême commun, à côté de la "communauté-Eglise-responsable". Supplément (Le) Paris, 1979, no131, pp. 527-557
[5]  Un sondage réalisé auprès de l'électorat catholique indiquait en 2009 que 61% d'entre eux étaient satisfaits de la présidence de Nicolas Sarkozy, en 2010, ils ne sont plus que 41% : 20 points en 1 an ! L’an prochain… à (la) Jérusalem (céleste) !
[6] Ernst Kantorowicz (1895-1963) est un historien allemand naturalisé américain, spécialisé dans l'étude des idées politiques médiévales et de la sacralisation du pouvoir royal. Son ouvrage majeur, Les deux corps du roi (1957), est devenu un classique de l'histoire de l'État, sous-titré une « étude de la théologie politique médiévale ». En se focalisant sur l'étude des Tudor, Kantorowicz y montre comment les historiens, théologiens et canonistes du Moyen Âge concevaient et construisaient la personne et la charge royales ; le roi possède un corps terrestre, tout en incarnant le corps politique, la communauté constituée par le royaume. Cette double nature, humaine et souveraine du « corps du roi », explique l'adage « Le Roi est mort, vive le Roi ! », le corps du souverain ne pouvant précisément mourir.
[7] Cf. le livre "Le religieux et le politique, Douze réponses de Marcel Gauchet", aux éditions Desclée de Brower
[9] NS s’est déclaré devant le Pape résolument chrétien !
[10] Cf. Nicolas Sarkozy intitulé, "La République, les religions, l'espérance", en 2004
[11] Propos recueillis par Anne Collin le mercredi 25 août - Nouvelobs.com, et mêlés aux élucubrations du signataire !
[12] Inspiré de Jean Daniel, La France de Sarkozy, Le NouvelObs,  25.08.2010

lundi 23 août 2010

LES CODES

lundi 23 août 2010


LES CODES


29 août 2010
Vingt-deuxième dimanche du Temps ordinaire Année C


LES CODES

Lectures:
Siracide 3, 17-29
Psaume 67
Hébreux 12, 18-24
4 Luc 14, 1 .7-14


La « parole » - quand elle est prononcée par le prophète de la Bible juive, par l’inspiré du Testament Nouveau, par Jésus Verbe de Dieu – la parole fonctionne comme un véritable code pour remonter le temps, et en déchiffrer les arcanes. Non pas une machine, une formule magique ou un abracadabra de conte de fée : mais un code, un moyen d’interpréter, c’est-à-dire une intelligence qui donne sens à l’Histoire. L’espérance - qui n’est au fond qu’un « désir éperdu de savoir ce qu’il en est au fond » - a intérêt à suivre les deux lignes de conduite que propose 

&






He 22 « Vous êtes venus vers le Dieu de tous, 23 le Dieu des esprits parvenus à la perfection, 24 le Dieu de ce Jésus dont vous avez écouté la parole.

C’est cela « franchir la porte étroite », c’est la clé de ce pays étrange, où chacun a sa place, et où personne n’a à comploter pour usurper celle d’un autre. Ecouter Jésus, c’est avoir trouvé « le Média­teur d'un Nouveau Contrat », c’est choisir « ce qu’il dit » - l'Évangile -, comme flèche du temps : c’est comprendre que

ce que le prophète prophétise dans le futur
devient,
dans la personne éternelle de Jésus,
un évé­nement du présent de l'Histoire[1].

C’est alors que son Esprit – l’Esprit de Jésus -, se transforme en Maître Intérieur et, devenant le maître de notre propre histoire, ne cesse – si nous le laissons parler et prenons le temps de l’écouter ! – de « nous rappeler toutes choses et nous conduire à la vérité tout entière » (Jn 1-, 13). Si l’action de Jésus s’est bien effectuée une fois pour toutes dans son temps historique - donc au passé -, chacun peut renaître à l’aujourd’hui de l'espérance grâce à la parole, à lui offerte en permanence, par le Christ éternel.

Ainsi « éclairé », l’homme comprend que sa condition tangue entre orgueil et humilité. Façonné de l'humus de la terre (adama), il reçoit le souffle même de Dieu (ruah) . Quand il oublie son origine permanente, il prend son élection pour prestige et orgueil. Placé au sommet de la création[2], l'homme a pourtant toutes les clefs pour « faire marcher le monde dans le bon sens ». 



Mais si l'orgueil le fait chavirer dans le mal, il fait sombrer le monde avec lui dans la violence. Niant Dieu d'un côté, l'homme se prend pour le maître absolu de l’Histoire ; jaloux de l'autre, il détruit quiconque convoiterait sa place au sommet ! Sirac le rappelle : « La condition de l'orgueilleux est sans remède car la racine du mal est en lui ».
En guérit-on ?
  • Confondre humiliation et humilité relève-t-il d’une perversité ontogénétique ou d’une confusion mentale passagère ?
  • Torturer pour extraire la vérité par la souffrance et le sang, est-ce la servir, cette vérité, ou satisfaire la part d’ombre de notre ignominieuse prétention à la perfection[3] ?
  • La soit disant incorruptibilité du dogme, est-elle au service des hommes qui ploient sur une condition humaine de plus en plus complexe et de moins en moins maîtrisable ou bien au service des hommes en place pour pérenniser leur position de pouvoir[4]?

*      L’humiliation ne peut que conduire à la violence et produire des révoltés : l’Eglise n’a pas fini d’en découdre avec la misère humaine qui l’ignorera de plus en plus, car elle croyait trouver chez elle un dieu doux et humble de cœur[5] !
*      Seule l’humilité conduit à la révélation des enfants de dieu et est à même de susciter de nouveaux apôtres, des disciples, voire des saints. Car elle ouvre à l'universel : chaque être humain, chaque peuple, chaque culture peut s'examiner. Quel est le choix de vie : l'orgueil, le mal, la violence et la mort ? Ou bien l'humilité, le respect, la paix et la gloire ?
Chaque culture a sa formulation : l'idéal du sage que Sirac nous propre est « Une oreille qui écoute. »
ü      Dieu parle à tous, même si tous n’entendent ni n’écoutent.
ü      Cette parole peut changer le cœur et l’esprit, c’est à-dire la vision.
ü      Elle est une clé pour franchir le seuil de TA porte et une lumière pour éclairer TON chemin :à chacun les siens !
ü      A toi de trouver TA clé et de choisir TA route ! Courage, d’autres l’ont fait avant toi !



L'humilité est le choix d’être de Dieu pour aller au devant des chercheurs : pour la mort de Jésus, le choix s’est même porté sur le châtiment des moins-que-rien. « C'est pourquoi Dieu l'a exalté et lui a donné le Nom au-dessus de tout nom » (Phm 2, 6-11).
Ah ça ! Il faut aimer le paradoxe et l’anticonformisme (unconventional), sinon on est définitivement lost quelle que soit la translation [6]!

Le paradoxe du Dieu unique, maître de tout, et qui se révèle dans et par la faiblesse !!!

On comprend bien que ce Dieu-là ne peut être une construction humaine, une projection de nos désirs : il ne peut que se révéler tellement il est inimaginable ! Comment en effet imaginer un dieu qui « se donne » tout entier dans le ris­que et la faiblesse ? C’est pourtant là qu’est NOTRE force !
C'est pourquoi Luc nous rappelle à toutes fins utiles que « les premiers » seront logiquement « les derniers » s'ils s'invitent eux-mêmes aux pre­mières places. Mettons-nous dans la tête que l'humilité n'est pas le résultat des humiliations qui ne créent que révoltés et violents ! L’humilité est une grâce de Dieu qui nous révèle notre place : si le Verbe a pris la peine de se faire chair, en Jésus le Christ, c’est pour nous révéler non seulement qui est Dieu (vrai Dieu) mais aussi qui est l'homme  (vrai homme)!

Qui est l’homme ?
C’est quelqu’un d’invité à entrer dans la salle du banquet, quelqu’un qui sait qu’il n’est pas le maître de céans, mais son invité, qu’il n’a à se soucier de rien d’autre que de jouir de la sollicitude de son hôte, qu'il n'a aucun droit sur les autres convives, invités comme lui, qu’il n'est enfin maître ni de la vie ni de la mort.

« Bienvenue  au festin de l'Agneau. »









[1] « Le Maître est là, et il t’appelle ! », dira Marthe à Marie, prostrée à la mort de Lazare (Jn 11,27)
[2] A peine le fis-tu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et splendeur (Ps 8,5-7)
[3] Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait (Mt 5, 48)
[6] On se souvient du film de Sofia Coppola, avec Bill Murray et Scarlett Johansson 2002 « Lost in translation »

jeudi 19 août 2010

Le nouveau rivage/virage théologique

Le nouveau rivage/virage théologique

Dimanche 22 Août 2010

21ème  dimanche du Temps ordinaire  Année C

Le nouveau virage / rivage  théologique


Lectures:
  • Isaïe 66, 18-21
  • Psaume 116
  • Hébreux 12, 5…13
  • Luc 13, 22-30


Au dernier chapitre de sa TLP ( sa Très Longue Prophétie : 66 chapitres !), le noble Isaïe surmonte l'épreuve de l'exil : la terrible déportation d'Israël à Babylone (- 587) devient le motif d'espérance d'un peuple immense. Nous voici devant un renversement prophétique abso­lument capital ! Le Dieu d'un peuple vaincu va devenir le Dieu unique qui fait des dieux de tous les autres peuples une mythologie ringarde!

Le « Dieu d'Abraham, Isaac et Jacob », le Dieu d'Israël se révèle le seul vrai, Universel, Créateur et Sau­veur, non pas Celui d'une nation, mais de toutes : « Israël devient, nous dit aussi saint Luc, ‘La Lumière des Nations’ ». Le choix porté sur cette nation-là n’est en rien un privilège, un prétexte pour se croire supérieure, mais c’est en revanche une lourde responsabilité, une mission « aux quatre coins du monde ». Election mystérieuse, que cette députation au service de toute l'humanité et qui se réalise historiquement à travers l'épreuve d’un exil de plus de 50 ans : de -587 à -537 !  L'épître aux Hébreux parle même d’une « leçon », d’un appren­tissage, celui de l'Amour universel de Dieu, comme un père l'apprend à son fils : une formation à la dure, sans concession ni compromission, dans l’exigence de la vérité pragmatique d’une existence soumise aux vicissitudes et aux aléas de la TGH (Très Grande Histoire) !
 



La voilà, cette « porte étroite » que tous les hommes, à la suite et à l’image d'Israël, sont invités à franchir, en laissant tomber tout orgueil, celui de l'homme paranoïaque qui prend la place de Dieu pour « faire le mal ». Etroite est cette porte, qui impose de se dégraisser - c’est-à-dire de se convertir en une monnaie forte, sans trop de zéros inutiles, ces cholestérols de l’âme -, si l’on veut connaître ce pays à l’envers, où « les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers ».

Comment percevoir, au milieu de notre monde, l’appel de ce Dieu si paradoxal, sinon en reconnaisant en chaque homme, ce Jésus de l’histoire, réalité incarnée, assassinnée et ressuscitée de ce Dieu surprenant ! Comment ne pas trahir cet appel, chaque fois qu’on le pervertit en privilège, ce complexe d’infériorité, ce prurit de pouvoir, ce mensonge criminel…

Oui, la porte de l’éternité est devenue étroite, d’accueillante qu’elle était censée être pour toute l’humanité. Notre propre liberté l’entrave, la rend opaque et la mure. Quand se lèvent un Jérémie, un Baptiste jadis, et hier un Martin Luther King ou un Oscar Romero, les forces du mal les massacrent, rendant cette porte plus étroite encore, par la terreur qu’elles inspirent  !

Il est des déportations du cœur, de l’esprit et de l’âme plus mortifères que celle des corps ! La moisson devient globale pourtant, mais les ouvriers manquent de courage pour sortir d’eux-mêmes et aller moissonner . C’est en chacun de nous que se construisent désormais les murs des camps de THS (Très Haute Sécurité). Auschwitz s’exporte bien et se délocalise partout : quand viendront nos libérateurs ? Y en aura-t-il seulement ?




Quand le Fils de l'homme viendra, trouvera-t-il encore la foi sur terre ? (Luc 18, 8)

« La plus grande persécution contre l’Eglise ne vient pas de ses ennemis de l’extérieur, mais naît des péchés de l’Eglise », déclarait Benoît XVI, en mai dernier : mais de qui parle-t-il exactement, puisqu’il est lui-même, l’Eglise, sa tête même[1]?

Si la vocation, l’appel et l’envoi sont une mission et non un privilège, l’erreur de l'Église, « le péché dans l’Eglise », hier comme aujourd’hui encore, est de succomber à la tentation de conduire à elle au lieu de conduire au Christ !

Elle reste tentée, en permanence et en chacun de ses membres, de vouloir baliser l'accès à Dieu en déterminant toutes les rencontres de l'homme et de Dieu, en en contrôlant toutes les voies d’accès, en « miradorant » tous les "check point charlie » de l’existence, et surtout ceux du sexe, qu’elle diabolise en pretextant le libérer, et où finissent par sombrer lamentablement - et aux dépens des plus « petits » -,  un nombre incalculable[2] de ses staffs, fascinés par ce à quoi ils ont du renoncer, non par choix libre et responsable, mais en raison même de leur incapacité de choisir à la fois, et de leur impuissance obsessionnelle à souffrir le manque.

Trop, c’est trop !

Voilà en plus que les 4% de catholiques brittish devront le mois prochain[3], at home, chez « la perfide Albion[4],  payer quelque 20 € le ticket d’entrée des messes « papistes ! »

Jérémie, Baptiste, revenez ! Même si vous risquez encore la prison et la décapitation ! Le Grand Inquisisteur a bien re condamné Jésus !
Quo vadis, domine ?



La rencontre de Dieu ne peut se vivre que dans la TGL (la Très Grande Liberté) : celle de enfants de Dieu justement !
Alors que nous vivons une époque extraor­dinaire ! Grâce au concile Vatican II, nous avons « découvert » que la foi ne s'impose pas, mais qu'elle se propose librement par nos rencontres jusqu'aux limites du monde! C’est çà, la nouvelle ACC (Appellation « Catholique » Contrôlée) : c’est le moment où jamais de la commercialiser!

Ø      Oui : Il y a bien une porte qui ouvre sur ce Pays où on finira bien par arriver[5] !
Ø      Oui : Cette voie d’accès est proposée à tous les hommes selon la grâce de l'Évangile.
Ø      Oui : Elle reste fermée à ceux qui veulent s'en emparer par leurs propres forces.
Ø      Oui : Elle est ouverte à quiconque s'appuie sur Dieu et sa Parole
Ø      Oui : C’est une TBN (Très Bonne Nouvelle) pour tous !



Oui : Il s'agit bien d'une porte d'espérance !



[1] Mai 2010, Voyage au Portugal : « Les souffrances de l'Eglise viennent de l'intérieur même de l'Eglise, du péché qui existe dans l'Eglise. Cela aussi on l'a toujours su, mais nous le voyons aujourd'hui de façon réellement terrifiante : la plus grande persécution contre l'Eglise ne vient pas d'ennemis du dehors, mais elle naît du péché dans l'Eglise, et l'Eglise a donc un profond besoin de ré-apprendre la pénitence, d'accepter la purification
[2] Le cardinal brésilien Claudio Hummes, préfet de la congrégation du clergé, reconnaît plus 20.000 prêtres pédophiles dans le monde !Le pourcentage de pédophiles serait de 4% dans les rangs du clergé, ce qui peut s’expliquer d’ailleurs de différentes façons. Soit le clergé attire des personnes de cette tendance soit le refoulement de la sexualité incite à se fixer sur des objets plus faciles. 20.000 prêtres catholiques de par le monde seraient pourtant impliqués. Au point qu’il faut se emander si ce sont des pédophoiles prêtres ou des prêtrs pédophiles !
[3] Septembre 2010, voyage du Pape en UK
[4] Dans Le Monde du 23 janvier 2007 (page 32), Marc Roche, correspondant à Londres, mentionne l'usage de cette expression par Bossuet au XVIIe siècle.
[5] Allusion à André Dhotel, Le pays où l’on n’arrive jamais.