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dimanche 27 février 2011

LES DELINQUANTS DU BIEN


LES DELINQUANTS DU BIEN
9ème DTO
Année A
6 mars 2011
Lectures :


L’époque est à la monnaie de singe ! On se paie de mots. Y compris – et depuis quelques années surtout - en religion et dans l’Eglise. Verba volant !
Cela suffit si peu que Jésus a cru devoir le dire expressément : « II ne suffit pas de me dire "Seigneur, Seigneur !" pour entrer dans le Royaume des cieux ; mais il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux. » En écho à Matthieu, Jean ne dira pas autre chose : « Petits enfants, n'aimons ni de mots ni de langue, mais en actes et en vérité » (1 Jn 3,18).
« Passer à l'acte », comme un délinquant, est l’impératif par excellence !
Mais les délinquants du bien, ne courent pas les rues, et quand il y en a, ici ou là, « on » trouve qu'ils devraient…, qu’ils auraient du…


 Être / Agir ?

Ne tombons pas dans la dynamique sartrienne des Chemins de la Liberté, entre « être et essence », et de « l’homme est ce qu’il fait » !
De façon plus populaire, on comprendra bien vite que’on ne peut pas être chrétien sans s’adonner ce faisant au bine et à la vérité…
Bine sûr qu’ « être » implique un « agir », et pas seulement un savoir théorique (Je sais…) et une stratégie de bureaucrate (Il faut qu’on…).
Nous voyons Jésus se ressourcer constamment, au plus profond de son être, dans la proximité avec son Père, et se mettant non moins constamment à l’aide des hommes et des femmes de son entourages ! Equilibre difficile à trouver puis à tenir, certes : mais c'est dans ce sens qu'il faut aller de toute façon ! Matthieu y répondra, plus tard, au chapitre 25, qua d il s’agira de régler les comptes ! Le seul critère ne serait autre que l'attention et le soin porté au prochain, c'est-à-dire le bien fait effectivement.

Car ce qu'il faut comprendre ici, c'est que faire le bien fait partie intégrante de la vie spirituelle. Pour des gens comme Jean Bosco et Vincent de Paul, c'en est même le cœur et l'essentiel. Pour ces gens-là – des saints, des grands saints ! -, gens concrets s’il en fut,  à toute heure passée en adoration / prière … devrait correspondre le même temps passé à servir les pauvres ou à accomplir toute œuvre utile pour les hommes : la charité active !

C’est pourquoi, de façon très pédagogique, avant la Cène, Jésus lave les pieds des disciples. Ceci ET cela ! La croix ne sera que le développement jusqu’au bout de cette mise de soi au service intégral ! Même sans aller jusque-là, il y a de la marge pour faire beaucoup de choses.
Être à la fois Marthe et Marie : une question  de jugement et d’&équilibre. Du bon sens, au fond, qui est la traduction profane du mariage de la charité et du discernement !

Il n’est pas facile d’opérer ce type de choix, comme dans tout choix. Et puis nous sommes des êtres de saison, comme les légumes ! Nous avons nos printemps et nos étés, mais aussi nos automnes et nos hivers. Faisons donc tranquillement la marmotte et le castor, quand nous sommes enclins à ceci ou à cela. Sachons seulement que la marmotte doit bien se réveiller un jour, et le castor cesser d’amasser !
Nos cœurs sont lents à consentir aux éclairs de la conscience et aux appels venus du ciel et de la terre. Créés  pour jouir du bonheur de Dieu, il nous faut apprendre à jouir du bonheur des hommes par le bien que l’on fait sous le regard de Dieu.
La Deutéronome nous rappelle, comme aux Hébreux dans le désert, la terrible loi humaine de la nécessaire détermination en toute chose :
 « Les commandements que je vous donne, mettez-les dans votre cœur, dans votre âme... » (Dt 11,26). Et encore à la fin du livre (30,15) : « Vois, je te propose aujourd'hui vie et bonheur, mort et malheur. Si tu écoutes les commandements du SEIGNEUR ton Dieu que je te prescris et que tu aimes LE SEIGNEUR, que tu marches dans ses voies, que tu gardes ses commandements, ses lois et ses coutumes tu vivras et tu multiplieras... »

À l'inverse, et naturellement, on obtient le résultat contraire : mort et malheur.
Mais cette loi, dis-tu révolte ta justice !
Elle n’est à tes yeux qu’un vulgaire caprice,
Qu’un piège où la raison trébuche à chaque pas !
Confessons-là, Byron, et ne la jugeons pas ! »
écrit Lamartine au Lord généreux et fantasque !

Plus près l'on se tient de la Parole de Dieu, plus près l'on se tient des autres
La Parole fait retentir un appel à la vie qui se donne : elle appelle une réponse qui conduit à Dieu en passer par le prochain et maintenant le lointain ! Rien de plus dramatique que de passer à côté des autres, de Dieu et de soi-même en définitive ! De se manquer, de se louper : ce serait l’aliénation !
Car ce serait se priver du mystère de la rencontre avec ce qui est A/autre et dont les retombées nous constituent en propre !



Le danger n'est pas illusoire que nos résistances à faire le bien l’emportent. Paul parle ne cesse de nous faire méditer sur les pesanteurs multiples et complexes qui grèvent le cœur humain : entre conditionnements ou circonstances extérieurs et dispositions intérieures, nos actions ne se révèlent pas toujours heureuses. C’est bine lui crie : « Le bien que je veux faire, je ne le fais pas ; le mal que je voudrais éviter, je le commets »... Invincible fatalité ? Non, mais mystère de nos résistances de nature ! Tout le monde est concerné. Pas d'exception : « Frères, tous les hommes dont dominés ! »

C’est en ce sens que La Parole est un pédagogue qui est là pour instruire et rendre chacun conscient de cette réalité. Et si elle source – non d’héroïsme, ce qu’elle peut être pour l’un ou l’autre -, mais d'accablement...- et sans doute l'a-t-elle été malheureusement ! -,  c’est qu'elle était mal comprise, parce que mal transmise par des esprits chagrins et malades, amateurs de la Loi comme instrument de leur pouvoir et d’oppression sur les autres !

Il faut apprendre à « habiter » ses résistances : c’est comme ça qu’on peut les réformer, les vaincre et les muer forces pour le bien. L'humanité du Christ, telle que la contemple et l'explique Paul, fait cela : elle vainc toute supposée fatalité du mal. En d'autres termes, s’il n’est pas toujours possible de faire tout le bien que l’on devrait, il est toujours urgent de tout faire pour y atteindre !



Demain est aussi un jour !


Demain est aussi un jour !

27 février 2011
8 ème DTO  Année A


Lectures
  • Isaïe 49, 14-15
  • Psaume 61
  • 1 Corinthiens 4,
  • 1-5 Matthieu 6, 24-34


Chacun se souvient de la chanson populaire Que Sera Sera (Whatever Will Be, Will Be), écrite par Jay Livingston et Ray Evans, utilisée dans l'intrigue du film L'Homme qui en savait trop, d’Alfred Hitchcock, en 1956, et interprétée par Doris Day, qui joue aux côtés de James Stewart !

Oui « De quoi demain sera-t-il fait ? » La question a certes toujours taraudé l'esprit inquiet de l'être humain qui d'instinct sait que rien n'est acquis, jamais ; mais plus encore de nos jours où l’incertitude et la précarité, dans les domaines public et privé, profane et religieux, deviennent de plus en plus le lot de chacune et de chacun. Bien sûr, les temps ont bien changé depuis l'époque où Jésus, dans un monde encore proche de la nature, parlait de la Providence divine. Depuis lors, l'humanité a fait un long et difficile chemin, et nous nous trouvons à présent en une époque où se manifestent tant de changements, rapides et profonds, que cette même question, nous la portons pour notre part – c’est notre responsabilité -,  et à notre manière – personne n’a la réponse toute faite : elle est à inventer ! C’est l’intensité des questions qui nous stresse et nous presse, et leur nombre, car elles nous tombent dessus à plusieurs à la fois et nous les vivons toutes en temps réel !

L’angoisse habite nos sociétés : c’est une réalité humaine tragique ! Les évolutions technologiques modifient à une allure exponentielle les rapports entre les personnes, elles affectent jusqu’à la sphère de la vie privée - au point qu'on en arrive à se demander si cette dernière n'est pas tout bonnement en train de disparaître ! Et pourtant heureusement que le Canard Enchaîné veille : car « les grands de ce monde » doibent savoir que leur position est un service altruiste, et non pas une sinécure égoïste : ces jours nos ministres passent de mauvais quarts d’heure et minent encore plus la crédibilité vacillante de leur gouvernance! Les mutations climatiques sont régulièrement, et sur toute l’étendue de la planète,  mises en cause comme jamais dans des catastrophes à répétition ! Quant aux imprudences humaines - directement imputables pour la plupart à l’avidité de la richesse -, elle causent de considérables dégâts écologiques – encore à venir ! -,  et font craindre le pire... L’être humain en vient à n'être plus sûr de rien.

Et surtout pas de demain... Car, de plus, tout augmente, sauf les moyens de vivre, tandis que le citoyen lambda apprend par les media (sinon, comment le saurait-il ?) que les bénéfices des banques n’ont jamais été aussi importants depuis la crise !

Oui, de quoi demain sera-t-il fait ? Connaîtrons-nous un demain, seulement ?

Quand la confiance menace ruine, l'inquiétude mène la danse, et le peuple se soulève… Ces derniers mois, de part et d’autre de l’an neuf, le peuple arabe du Maghreb proche et de l’Afrique égyptienne ne cessent de nous administrer la preuve que trop c’est trop, et que lorsque s’ajoute à la misère, la corruption à la tête de l’état, la révolte et la révolution suivent légitimement le soulèvement dont on n’a pas voulu tenir compte.

Mais est-ce une fatalité ?

Car enfin, on ne peut vivre constamment dans l'angoisse que demain soit « apocalyptique »...
Alors que faire ?
L'Évangile de ce jour se tient au plus près des réalités et des besoins les plus fondamentaux de la vie : la nourriture et le vêtement, la sustentation et la protection.
Nombreux - et toujours trop nombreux - sont ceux et celles qui n'ont même pas ce minimum vital. Nombreux - peut-être encore davantage - ceux et celles qui manquent de tout !
Chez nous ! En France ! Près de chez vous !

C'est à l'école de la rue et des choses simples que s'apprend l'essentiel évangélique. Jésus vivait dehors, dans la rue, il n’avait pas de foyer, sinon celui de ses amis ! Il s’adonnait à l’unique nécessaire et gardait présent à l'esprit la valeur des choses - et d'abord celle des choses les plus simples - : le sens de la hiérarchie des êtres et des priorités de la vie.

Cette disposition d’E/esprit – qui est une véritable sagesse -, s'établit sur la liberté du cœur et, partant, sur le refus décidé de toute âpreté au gain, de toute avarice, de tout égoïsme mesquin.
Au bout du compte, cela revient à renoncer à toute sécurité illusoire.  Et à affronter la réalité des choses en l’état…

On peut toujours s'évader dans le rêve, quitter la réalité telle qu'elle est, la vie dure, telle que nous la connaissons au jour le jour : toute de précarité.
Civil courage ! dit-elle.
Aujourd’hui, chacun est invité à méditer sur la fragilité des choses - qui est aussi la nôtre - pour y faire face et pour habiter au mieux cette réalité.



C’est Cette insoutenable légèreté de l’être, de Milan Kundera 1982. Légèreté  et profondeur du vacillement de l’être dans l’exigence de satisfaction  immédiate, sans jamais y atteindre pour cause d’inconsistance d’un désir : débordant, oui, mais de vanité et de vent. Et en même temps, pesanteur des principes, lambeaux vides de sens désormais, selon une morale formelle, sans âme, rigide et prédéterminée. Mais notre légèreté est parfois tellement présente qu'elle en devient insoutenable : en effet nous vivons, nous autres Occidentaux, dans un monde où cette légèreté  se change en ridicule ! Ayant tous les atouts pour que notre vie s’illumine, nous choisissons d’aller dans le mur !

S'attacher aux choses pour mieux s'en protéger n'est pas la solution : Jésus le dénonce ! Ne voit-on pas que trop amasser se fait pratiquement toujours au détriment des autres, de la création et de nous-même  au bout du compte ? La course aux assurances est aussi dérisoire !

Il n’y a pas d’échappatoire : « Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'argent. » Et là, il n'y a rien à discuter, rien à négocier. C'est une vérité nue et crue, à prendre telle qu'elle est livrée. Cest surtout une vénté qui libère…

La prière du Missel explicite dans un langage liturgique - qui ne passe plus, mais enfin ! - : « En faisant un bon usage des biens qui passent, s'attacher à ceux qui demeurent ». En d'autres termes, contemporains, ceux-là,  il s'agit de laisser les choses être ce qu'elles sont, ni plus ni moins.
Et l'argent n'est ni un dieu, ni une fin en soi.
L’argent est un moyen, un grand moyen mais un simple moyen.
Absolument nécessaire, certes, répétons-le : mais encore une fois, un moyen seulement.

Au bout du compte, comprenons qu’à la Providence de Dieu doit répondre notre prudence : cette Providence s'exerce par l'intermédiaire de notre prudence, c'est-à-dire notre capacité à répondre aux besoins que nous rencontrons, notre aptitude à discerner ce qui est  juste, le geste opportun de partage, de générosité ou de pardon, la parole et l’action qui convient à tel ou tel moment.


mercredi 23 février 2011

Excusez mon silence !

Chères et fidèles lectrices, Chers et fidèles lecteurs !

Je me trouve en retraite annuelle devant l'immensité de la mer...


Étant absent de Cannes et loin de mon ordinateur, je ne peux publier l’homélie de dimanche 27 février !

Je rentrerai ce même jour et mettrai immédiatement en ligne l'homélie du 27 février en retard et celle du 6 mars, en avance…

Encore 1000 excuses !

Je pense à vous (vous voyez !) ;-)
Et prie pour vous!
Faites de même pour moi!

@ +!

Père Vincent-Paul

mardi 15 février 2011

LE COÛT DE L’EXCELLENCE

20 février 2011
LE COÛT DE L’EXCELLENCE
Septième dimanche du Temps ordinaire
Année A

Textes
§          Lévit. 19,1-2.17-18


Nous sommes régulièrement affrontés à notre faiblesse, notre couardise, quand ce n’est pas notre débilité mentale ! Nous nous l’avouons à nous-mêmes, d’ailleurs, mais pas en public, plutôt en contemplant notre « gueule de fioriture » dans le miroir de la salle de bains ! Alors le chemin est long pour suivre cette «invitation musclée » :
Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait.

Voilà de quoi nous laisser cois et, pour le dire franchement, plus que perplexes : incrédules et paralysés ! Jésus ignorerait-il … encore… à ce point la nature des hommes du monde dans lequel il est venu ? J’ai plutôt le sentiment qu’il a saisi l'occasion - trop belle pour ne pas être saisie -, et  il met le doigt là où ça fait mal. Et il le sait. Et il le fait exprès.



Sadique le Jésus ?
Sadique le cancérologue qui répond à qui l’interroge, qu’il n’en a plus que pour deux ans maxi, à l’allure où il fume ?
Sadique le psy ou le prêtre qui  ne peuvent que constater l’échec d’un couple dont ils se demandent s’il y a eu vraiment mariage au moment du mariage ?
Sadique le prof qui prévoit l’échec au bac de celle ou de celui qui passe tous ses week ends en boîte et met deux jours à récupérer ?

Non, le monde est bien tel qu’il est, mais ce n’est pas pour autant qu’il faille renoncer à dire ou à faire quelque chose… sinon il faut fermer la boutique et jeter la lé à la mer !

A ce propos, je m’interroge toujours pourquoi le Père et le Fils, avec le Saint Espri,t ont décidé de retirer Jésus de l’équipe de sauvetage, à l’âge de 33 ans ! Plutôt jeune encore, non ?
Ils savaient déjà, ils connaissaient déjà le cœur de l'homme que leurs fantastiques prophètes ont décrit comme « compliqué et malade », l’exemplaire Jérémie, par exemple.


Le pire pour nous chrétiens, le plus difficile à reconnaître deux mille ans après l'Incarnation, c'est bien que la venue du Seigneur, sa prédication, sa mort et sa résurrection, l'envoi de l'Esprit... tout cela semble n'avoir rien changé. J’écris « semble »… Je crois que ce n’est pas vrai, quoique j’aie quelque peine à le croire !

Le mal est toujours à l'œuvre de mille et une manières sans cesse renouvelées. Le plus souvent, avec nos sourdes et honteuses complicités, le plus souvent par nos omissions : c’est la catégories des politiques et des traitres ! Le comportement des chrétiens - et des catholiques en particulier toutes étiquette confondues – et à titre individuel ou communautaire - au long de l'histoire du monde autorise un jugement très sévère : et en nos temps, idem !
Pas plus que les autres  - et tous les autres ! -, nous n'avons su résister aux séductions du pouvoir – cela s’appelle maintenant « la stabilité dans la région » [ allez le dire aux Tunisiens st eux Egyptiens !] -, non plus qu'à ses forces sombres et à ses violences : évidemment quand nous l’avions, ce pouvoir !  C’est pourquoi nous étions présents dans l‘histoire « par pensée, par pensée et par action » ! Aujourd’hui, n’ayant plus que le goupillon et plus de sabre, on se limite à être absent de l’histoire, nouvelle définition de « par omission »  !
Mais soyons honnêtes totalement - puisque je ne laisse pas de balayer devant ma porte -, eussions-nous été « parfaits », il n'est pas sûr que le monde pour autant eût accueilli l'Évangile. Il s'en faut de beaucoup que tel eût été le cas...  Mais , comme nous avons été loin d’être parfaits, le résultat est d'autant moins probant.


C’est ce « d’autant moins » qui est à regretter ! Attention, il ne s’agit pas ici de je ne sais quelle autoflagellation de mauvais aloi.  Mais clairement et simplement de ce que dans ma jeunesse on appelait encore un « examen de conscience »

Parce que ce ne sont pas non plus les quelques gestes de demande de pardon du futur bienheureux JPII – qui ne coûtent rien à l’aune de 2000 ans d’histoire, il faut dire ! – qui vont pallier l’absence de volonté politique, sinon de changement, au moins d’ouverture et d’évolution ! Je dirais d’intelligence des signes du temps présent – pour plagier avec plaisir un autre pape qui mériterait d’être, lui, « santo sublito »… depuis un moment déjà ! !

Oui, on peut toujours analyser justement et souhaiter légitimement que le monde se renouvèle, ou notre société contemporaine, lors même que les relations entre les hommes demeurent si entachées par la haine, et que l’Eglise elle-même n’est exempte ni d’affairisme, ni de compromission, ni de scandale ! ?
Oui, de toutes parts, on rapporte des tensions, des affrontements, des soulèvemen,ts, bientôt la révolution du grand peuple des Arabes ! Et personne n'ignore que la question de la  religion fait partie des données du problème - au grand dam, il est vrai, des cœurs vraiment religieux et des authentiques artisans de paix, de par le monde ! Au grand dam surtout du Dieu au Nom (Hashem !)  de qui on commet toutes sortes d’horreurs ! C’est sans aucun doute là que sont la vraie tristesse et le vrai malheur ; là, le vrai péché : que l'homme instrumentalise Dieu - et par là même les autres hommes -, à son profit, pour assouvir son goût de pouvoir jupitérien paranoïaque sur ses semblables et sur la planète ! Comment être « miséricordieux comme le Père céleste est miséricordieux » ?


C’est là  donc qu’il faut être aussi radical : pas étonnant que Jésus appelle, sans compromis possible, à une perfection qui tranche radicalement avec l'humaine condition et ses travers les plus détestables.
C’est donc aussi cette détermination que le Christ – mort et ressuscité -, attend de ses disciples : d’une part :  « Que votre oui soit oui, que votre non soit non. », d’autre part « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ! »

On comprend que Paul s’en fasse l’écho : lorsqu'il invite les chrétiens à n'avoir entre eux d'autre rivalité ou d'autre dette que celle de l'amour fraternel qui s’en donne les moyens et l’obligation prophylactiques par le lien de la miséricorde, à l’image de Dieu lui-même ! Certes la perfection est « quelque chose » d’intérieur, de moral, etc. : on pourrait allonger la liste...  On s’aperçoit tous les jours que dans l'approche et la compréhension de la religion, cette perfection est plutôt mince ! Comment faire entrer alors en même temps « perfection et miséricorde » dans la juste compréhension de ce que le Christ attend de ses disciples ? En matière de loi, l’amour miséricordieux et la tentation de perfection doivent être des actes quoitidiens, un travail sur soi, d’abord : un entraînement régulier et san relâche !

L'exigence divine d'aimer est déconcertante : peut-on exiger l’amour de quelqu’un ? C’est pourtant là que se joue la vie humaine, sa « réussite » ou plutôt son accomplissement.  « Quand bien même je livrerais mon corps aux flammes, si je n'ai pas la charité, cela ne me sert de rien » (1 Co 13)!
Si Jésus est si radical, c’est que  c'est sur l'amour que nous jouons notre vie. Il est inutile de chercher à biaiser, à faire du zèle en dehors de ce grand enjeu de notre vie chrétienne et humaine.
Le seul rendez-vous de notre cœur est avec l'amour de Dieu et ce qui nous attend certainement, c'est l'expérience cuisante que nous ne savons pas aimer comme il faut, c'est-à-dire comme lui-même aime.

Avoir l'ambition – la tentation ! -, de la perfection, avoir l'ambition – la tentation ! -, de la sainteté, et tout mettre en œuvre pour « succomber à cette tentation »,  c'est le but même d’une existence.
Jésus redit à l’envie que cette perfection, cette sainteté, coïncide exactement avec ce que l'on nomme amour et miséricorde, et se fiche de toutes nos fausses exigences religieuses.

Notre époque est pleine de violences en tous genres (y compris religieuses). Elle a plus que jamais besoin de l'engagement et du témoignage aimant de tous les disciples du Christ ! Pourquoi ? Mais parce que nous crie Paul :



tout vous appartient,
Paul et Pierre,
le monde et la vie et la mort,
le présent et l'avenir :
tout est à vous,
mais vous, vous êtes au Christ,
et le Christ est à Dieu.

dimanche 6 février 2011

QUE VOTRE OUI SOIT OUI !


QUE VOTRE OUI SOIT OUI !

13 Février 2011
6ème  Dimanche du Temps Ordinaire
Année A

Textes
§          Sirac 15,15-20

 « Quand vous dites un "oui" que ce soit un "oui" ; quand vous dites un "non", que ce soit un "non". » Non seulement ce qui est la chance et le drame de notre vie : la possibilité de choisir, de choisir vraiment ! Mais aussi, et surtout, l’exigence du civil courage et de la conviction pour choisir effectivement ! La théorie est belle à défendre, mais la pratique est « à faire », quel qu’en soit le prix !
Oui, c'est tout à la fois simple et peu évident, à cause soit de notre velléité soit de notre inconstance. Atermoyer est pire que de ne pas se décider, pire que de ne pas choisir, car c’est choisir à moitié ou choisir tout et son contraire !




Et pourtant – à certains moments – volens nolens, il faut choisir ! « Voici que je mets devant toi vie et bonheur, mort et malheur... Choisis donc la vie ! » (Dt 30, 19). Et que rapporte la Genèse, sinon les chances et les dangers des bons ou des mauvais choix ?
Et il n’y a pas d’excuse, même s’il y a des circonstances : on peut se sentir un perdu, éprouver le besoin de repères, de références. La Loi donnée par Dieu à Moïse et transmise par ce dernier au peuple de l'Alliance n'avait pas d'autre fonction. Rappelons-nous le contexte : Dieu donne d'abord son Nom et, par-là, il se confie. Vis-à-vis de l'homme, sa créature, il pose un acte de souveraine confiance. En retour, il attend une réponse à la hauteur de sa position. La Loi qu'il donne par après, est destinée à aider l'homme à répondre à sa confiance. Mais cette Loi ne peut s'imposer. -C’est ça la nouveauté de CE DIEU-LA -,  Il revient à l'homme d'y faire droit, de s'y confronter. « Si tu le veux, tu peux observer les commandements, il dépend de ton choix de rester fidèle » (Si 15, 15).

N’inversons pas les positions pour autant.
Une loi – cette loi de Dieu en tout cas -, ne s'impose pas en tant que telle. Elle se « s’impose » avec profit, qu'à celui qui s'y soumet en vérité et en conscience. Ce type de Dieu ne supporte pas l'obéissance servile, non réfléchie : cela ne le touche pas !
Une atti­tude juste vis-à-vis de sa Loi semble être de se poser toujours la question : qu'est-ce que la Loi me suggère, me conseille, m’invite à faire ? Et, bien sûr, il est illusoire d'attendre des réponses au coup par coup, comme par magie. Au contraire, cette appelle et exige même une étude constante.

Pour chanter avec le psaume : « Heureux est l'homme qui se plaît dans la Loi du Seigneur et murmure sa Loi jour et nuit », c’est que cet homme a pris le temps de comprendre ce qu’elle est en soit, et ce qu’elle peut signifier de positif pour lui !

Paul, qui vient de loin,  dans le passage de la première épître aux Corinthiens de ce dimanche, confie – et il sait de quoi il parle – qu’à  la clef de cette étude, il n'y a pas la peur, la servitude ou l’aliénation, mais la reconnaissance que Dieu est Dieu ! Et la perception d'un certain ordre des choses qui procède de sa souveraineté : ce dieu appelle tout être et toute chose à l'existence et donne sens à tout. Sa créature aimée est l’homme à qui il a donné « sa propre image » 



On aime à citer saint Paul en l’occasion :
Ce que nous proclamons, c'est, comme dit l'Écriture, ce que personne n'avait vu de ses yeux ni entendu de ses oreilles, ce que le cœur de l'homme n'avait pas imaginé, ce qui avait été préparé pour ceux qui aiment Dieu. Et c'est à nous que Dieu, par l'Esprit, a révélé cette sagesse. Car l'Esprit voit le fond de toutes choses, et même les profondeurs de Dieu (1 Co 2, 10).
Le fruit de l'étude en question n'est pas un savoir théorique  ni cérébral : « tout dans la tête, rien ailleurs… ». C'est plutôt la sagesse d'un cœur en alerte qui veut aller vers plus d'accomplissement de soi et plus de liberté de réalisation.

Le long discours de Matthieu confirme.
Le neuf, c’est que cette loi se lit depuis Jésus à la lumière de sa vie propre: la sienne et la nôtre. Le commandement de Dieu – son père net le nôtre -, n’est plus étranger, froid et ni impersonnel : au contraire, il fut vraiment accompli quand quelqu’un - ce Jésus -, est allé  jusqu'au bout de ce qui est demandé : la Loi fut observée par le Fils de Dieu lui-même et a porté du fruit dans la vie humaine,
non seulement parce qu’il a fait droit à son exigence de justice, mais parce qu’il est allé  jusqu'à son ultime exigence : le faire par amour de son Père. Le « bien » fut fait « simplement » parce que c'est le bien et qu'il faut le faire ! Gratuitement !

Et chez Jésus, de plus, entre ce qu’il a voulu faire et ce qu’il a fait effectivement, entre ses intentions et ses réalisations l'écart fut nul ! Jésus se montra à la hauteur de Dieu !
Au risque de se laisser décourager ? Il a fallu passer par Gethsémani : espérance que  sa faiblesse humaine nous offre en vérité et possibilité. C’est en cela que cet exemple et cette parole aide chacun, dans sa détermination sur le chemin du bien, de la justice et de l'amour. Exemple pratique de la persévérance et de la patience/passion sur un chemin de croix où abondent embûches et échecs.



D’où l'injonction de Jésus à ne pas se laisser entraver le cœur par l'indétermination : « Que votre oui soit oui et que votre non soit non. » Le problème ne sera pas le nombre de fois où nous devons redire notre « oui » s'il s'affaiblit en « non » (77 X 7 fois !).

La station service de la miséricorde est ouverte 7 jours/ 7 et 24h / 24
Et cela fait un certain temps que ça dure !

mercredi 2 février 2011

JESUS performatif…



6 février 2011
JESUS performatif…
5ème  dimanche du Temps ordinaire
Année A
Lectures :
-          Is 58,7-10


L'Évangile de ce jour est très réconfortant à entendre, et en même temps, il peut donner mauvaise conscience de ne pas en être à la hauteur, en tout cas pas toujours. Cela vaut pour chacun et pour ce « grand corps malade », tout mystique qu’il soit : l’Eglise !


Ainsi, d’après Jésus,  nous serions / sommes appelés à être « le sel de la terre et la lumière du monde » (Mt 13-14). Le sel qui purifie de tout miasme (les salaisons) et de toute morosité (en donnant de la saveur : même radical que ‘savoir’ = sapere. On mettait du sel sur les lèvres de l’enfant à baptiser…). Et la lumière, donc, censée  délivrer de la nuit et montrer où est  le che­min !

Et en plus, termine la péricope : « Que votre lumière brille devant les hommes » (v. 16). Il aurait pu/du ajouter : « Et donnez-leur envie de boire et de manger – d’apprécier, de trouver goûteux -, ce que vous leur servirez, donnez du goût à vos paroles et à vos actes ! »

En effet il ne suffit pas de dire, de répéter et de finir par lasser ! Si celui qui parle n’est pas écouté, les raisons en sont, nous le savons, très diverses. Mais puisque l’évangile s’adresse à celui qui parle et non à celui qui entend et qui parfois écoute, c’est sur le pro-phète – celui qui lance la parole devant lui -, que nous sommes invités à nous concentrer.

Ø      Oui, suffit-il de nous dire : « Soyez !» pour que nous le soyons. Ou bien: « Brillez ! » pour que nous brillions ? Ici l’impératif n’est pas catégorique du tout !
Ø      Faut-il que nous ayons l'allure de gens à la conscience malheureuse et à la « face de carême » qui s'efforcent sans cesse et jamais ne parviennent, qui prennent aujourd'hui de fermes réso­lutions et ne les tiennent pas le lendemain ?

-          Que nous soyons des velléitaires - à un moment ou à un autre, souvent même -, est une chose ! C’est pour quoi Jésus utilise d’abord l’indicatif : « Vous êtes ! »
-          Et s’il passe ainsi d’un « constat objectif » au « projet subjectif » qu’il nous confie, c’est que naturellement et surnaturellement, il y aura toujours un passage à effectuer entre la connaissance de soi et ce à quoi nous nous sentons ou sommes appelés. Tout le « jeu » de l’appel et de la vocation est là : du « qui je suis » au « qui je veux être ».



Autrement dit : nous révélant à nous-mêmes qui nous sommes déjà potentiellement [« Vous êtes »], et parce que nous le sommes déjà [-sel et lumière -], il se permet ensuite de nous proposer de le devenir effectivement (c’est là « la vocation »), c’est-à-dire de « montrer aux hommes »  par nos actes, comportements et habitudes, que nous le sommes vraiment ! Oui, nous le sommes et nous le prouvons ! Laissons nous juger le tas !

Le jeu de la vocation se situe quelque part entre Salinger et Malraux !


C'est marrant, (il) suffit de s'arranger pour que quelqu'un (ne) pige rien à ce qu'on lui dit et on obtient pratiquement tout ce qu'on veut (de lui).

C’est la foi que les autres mettent en  nous qui nous fait avancer.
 André Malraux


Le « Sitz im Leben » d’un texte – c’est-à- dire les circonstances spatio-temporelles où ce texte a été écrit – n’est pas neutre quant à sa nature et à son intention. Cela vaut aussi pour sa situation dans l’élaboration d’un ensemble plus grand. Ainsi la péricope de Matthieu ne s’inscrit pas de façon neutre dans son corpus. C'est aussitôt après que Jésus ait proclamé les huit béatitudes : aux pauvres de cœur, aux doux, aux miséricordieux, aux persécutés ! On peut donc penser tout aussi logiquement, que c’est à eux qu'il s'adresse quand il dit : « Vous êtes le sel de la terre, [...] vous êtes la lumière du monde ».

Si c’est juste, demandons-nous s’il le sont - sel et lumière - parce qu'ils sont pacifiques, miséricordieux, pauvres et purs ?
-          Si c’est comme ça, alors nous devrions entendre les béatitudes comme des, commandements : ce qu'elles ne sont pas puisqu'elles ne font que constater et manifester – révéler ! - un bonheur caché jusque-là.
-          Si ce n’est pas le cas, alors il faut bien admettre que l'homme n'est pas ‘sel et lumière’ en raison de ses œuvres !

Ø      Mais en raison de quoi l'est-il, s'il ne l'est pas en raison de ce qu'il fait ?

Si Jésus proclame d’une part : « Heureux ceux qui font la paix, ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9), et si faire œuvre de paix n'entraîne pas que l'on soit automatiquement ‘sel et lumière’, il n'y a qu'une solution possible :

nous sommes sel et lumière
en raison  de la seule promesse que Jésus fait
en  appelant à sa suite !

Autrement dit,
c’est en acceptant de le suivre
que nous sommes / devenons sel et lumière,
son sel et sa lumière,
 le sel et la lumière de sa vie !

Et si nous décidons de répondre à son appel, c’est que nous croyons fermement que cette promesse de Jésus est sans condition, inconditionnelle et, par là, créatrice ou re-créatrice de vie. Elle annonce ‘simplement’ ce qui reposait déjà au cœur de l’éternité : nous croyons alors que déjà nos noms sont inscrits dans le livre de vie, que déjà nous sommes « héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ » (Rm 8, 17), que déjà nous sommes « prédestinés à reproduire l'image [du] Fils [de Dieu] » (Rm 8, 29). Alors tout prend sens dans notre existence, et nous devenons (enfin) ce que nous sommes…déjà !

Ce « déjà » irrécusable, mais nous le trouvons partout, par exemple dans la première épître de saint Jean : « Dès mainte­nant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement » (1 Jn 3, 2), et à la toute première eucharistie : « Et moi, je dispose pour vous du Royaume, comme mon Père en a disposé pour moi : vous mangerez et boirez à ma table dans mon Royaume » (Le 22,29-30).



C’est alors – et alors seulement -,  que peut sonner l’heure des « bonnes œuvres » ! Il y aura eu d’abord - comment dire ? - la tendresse du Père de Jésus qui laisse déborder sur nous les biens de son Fils : cet amour sans mesure qui traverse à notre crédit le hiatus de la mort, cette grâce surabondante de l'Esprit qui dépose ce don au plus intime que nos cœurs. Ah, que les mots sont donc usés et banalisés ! Mais comment dire ce qui est indicible ?

Comment dire qu’on est aimé, sinon en disant… qu’on est aimé !

Comme un flash (comme le Factus est repente de la Pentecôte, le Aha Erlebnis de Freud, le Mais c’est bien sûr de l’Inspecteur Bourrel !), d'un seul coup, nous le voyons ! La parole de Jésus balaie nos sys­tèmes de référence et de notation :

plus besoin du regard d'approba­tion ou de désapprobation des uns ou des autres autour de nous, ni de bonnes œuvres ni de bonnes résolutions[1]
mais l'unique regard éternel qui crée et re-crée plus admirablement, celui du Père « qui voit dans le secret » (Mt 6, 4) ;
mais cette Présence, enfin nommée, qui nous donne de pouvoir de bien œuvrer !

Et notre tâche première consiste alors à l'accueillir en ‘eucharistein’, en ‘eucharistiant’, en disant merci !

Le reste, tout le reste nous sera « donné par surcroît » (Mt 6, 33).

Les cieux sont à moi.
Et la terre est à moi.
À moi les nations, à moi les justes, à moi les pécheurs…
Les Anges sont à moi et la Mère de Dieu est à moi.
Tout est à moi.
Dieu est à moi et pour moi puisque le Christ est à moi et tout entier pour moi !

Jean de La Croix




51 Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous, moi, vous ne m’aurez pas toujours ! Jn 12,8