lundi 10 octobre 2011

Tel est pris …

Tel est pris …
29e dim. temps de l'Église

16 Octobre 2011

Textes
-          Is 45,1.4-6.
-          Ps96(95),1.3.4-5.7-8.9-10a.10c.
-          1Th 1,1-5b.
-          Mt 22,15-21.

Pharisiens et Hérodiens (le goupillon et le sabre !!!) font alliance pour tendre un piège à Jésus ! Rien ne change ! C’est une alliance étonnante, quasi contre nature! D’un côté des pharisiens, i.e. des juifs conservateurs nationalistes, et de l’autre des Hérodiens, i.e. des collabos avec l’occupant romain.


Années 30. L’empereur est  le « fameux » Tibère, un vieillard libidineux qui survit à Capri, dans le stupre et le sang !  Son effigie – ce qui lui sert de figure ! -, frappée sur toutes les pièces de monnaie d’argent, marque sa souveraineté. Le comble, c’est que ce monstre – nous apprendra l’histoire ! -, se prend pour un Dieu, tant sa puissance est grande, et tant sa domination est écrasante. Israël rejette ce culte de l’empereur et le hait : c’est l’envahisseur qui réduit les hommes en esclavage et les empêche de se gouverner par eux-mêmes. Les zélotes (OAS et IRA mêlés) sont les seuls qui refusent de payer l’impôt.

On comprend l’importance et la gravité de la question du débat !
Est-il permis oui ou non de payer l’impôt à César?
Car payer l’impôt c’est faire acte d’allégeance envers l’empereur païen ; ne pas le payer c’est lui refuser d’être soumis, c’est lancer le signal d'une insurrection, d'un soulèvement contre le pouvoir établi : atteinte à la sécurité intèrieure de l’empire. Un seul châtiment : la mort !

Le traquenard est diaboliquement habile:
-          si Jésus dit oui, payons l’impôt, il perd toute sa popularité auprès du peuple, un peuple qui attend un messie, un libérateur « boutant » le romain hors d’Israël !
-          Si Jésus dit non, ne payons pas l’impôt, il sera alors dénoncé à l’autorité comme agitateur et opposant contre Rome.
Ainsi est-ce un vrai dilemme : quoi que Jésus réponde, il est perdu!
C’est ce que la psychologie appelle le « double bind » : il n’y a pas de bonne réponse



Le livre de la Sagesse bien « pré-vu » la tactique :  «Traquons le juste: il nous gêne, il s’oppose à nos actions, il nous reproche nos manquements à la Loi, il nous accuse d’être infidèles à notre éducation. Il déclare posséder la connaissance de Dieu et il se nomme enfant du Seigneur, il se vante d’avoir Dieu pour père. Voyons si ses paroles sont vraies et vérifions comment il finira» (Sg 2, 12-17).

Jésus est mis à l’épreuve, mais il n’est pas tombé de la dernière pluie ! Il contre interroge à son tour :
« De qui est cette image et cette inscription? ».


En exigeant qu’on lui présente un denier romain – CAD une pièce de monnaie servant à payer l’impôt -, Jésus déjoue le piège qui lui a été tendu, et le retourne contre eux !

-          En effet Jésus ne sort pas la pièce de sa bourse (il n’en a pas de toute façon !), non CET argent ne vient pas de lui, mais bien de ceux qui lui veulent du mal.
-          Ces sont eux, Hérodiens et pharisiens, qui se scandalisent à grands cris d’orfraie devant la subordination à l’empereur, ce sont eux qui ont sur eux cet argent, cette monnaie de la honte. Hypocrites, ils jouent les scrupuleux, alors qu’ils portent - et supportent donc -, l’argent impie et son Maître. Pour eux, rendre l’argent à César ne souillera pas plus leur conscience que de s’en servir chaque jour. Ce n’est pas la vérité qu’ils cherchent malgré leur approche mielleuse qui n’a trompé personne et surtout pas Jésus ! Ils n’attendaient strictement rien de cet interrogatoire, sinon un motif d’accusation. Tous les pays occupés produisent cette engeance excrémentielle, ne respirant que malveillance, trafic et trahison !

Maintenant qu’il a repris la main, Jésus ne vas pas les laisser là, ces malfaisants, tenant en main la pièce à conviction de leur hypocrisie. Au contraire, il va profiter de cette opportunité pour donner un enseignement essentiel et qui fait toujours couler beaucoup de salive et d’encre !

«Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu».

C’en est devenu un proverbe. On le trouve même dans les pages roses du Larousse. Mais qu’il est mal compris :
-          comme si Jésus prenait bêtement parti pour la séparation de l’Eglise et de l’Etat,
-          comme si Jésus accordait docilement à l’Etat sa totale autonomie
-          comme si Jésus demandait égoistement à ses disciples de ne pas prendre parti dans les affaires temporelles.

C’est oublier dans la confusion que les deux parties de la phrases ne sont pas égales.
César, lui aussi – qu’il le reconnaisse ou non -, appartient à Dieu!

L’argument de Jésus est donc le suivant :
-          si cette pièce appartient à César, parce qu’elle en porte l’effigie, son image et son inscription,
-          combien plus ceux qui sont à l’image et la ressemblance de Dieu, doivent revenir à Dieu !
-          Si César a pu imprimer son image sur les pièces de monnaie, qu’il faut donc lui rendre,
-          à combien plus forte raison la personne humaine marquée à l’effigie de Dieu doit-elle se rendre toute entière à Dieu!



Remarquable démonstration! En effet, par l’ajout de ce second volet, totalement inattendu de ses contradicteurs, Jésus renverse les perspectives. Il affirme qu’il n’est pas venu pour trancher les litiges humains, mais pour nous montrer
le chemin qui conduit à Dieu :
reconnaître que tout est issu de Dieu et que tout est fait pour retourner à Dieu (exitus/reditus).

La place du politique, du temporel, des affaires, du commerce, de l’économie, de l’argent et des banques….bref de « la pièce à l’effigie de César », tout cela ne peut se faire désormais qu’à la lumière de la perspective nouvelle introduite par le Christ, c'est-à-dire sur l’horizon de la relation primordiale de tout homme à son Créateur et de la fraternité universelle qui en résulte logiquement.

A y regarder de plus près,
la seule leçon politique de l’épisode est que César n’est pas Dieu.

Mais d’autre part – et voilà la feuille de route du chrétiens -, rendre à Dieu ce qui est à Dieu c’est, en revanche prendre ses responsabilités au service de l’homme et de tous les hommes.

Ø      Le chrétien n’est ni apolitique ni anarchique. C’est un homme qui respecte les lois de la cité et de l’état – un homme qui paye honnêtement ses impôts car c’est un devoir de justice pour un chrétien.
Ø      Mais il se garde d’oublier que la vie des puissants est dans la main de Dieu et qu’«ils n’auraient aucun pouvoir s’il ne leur avait été donné d’en haut» (Jn 19, 11).

ü      Au milieu des coups de formules et de slogans, le chrétien ne fait aucune politique spectacle ni ne se vend aux médias ni essaie de passer en force.
ü      Mais devant l’urne, il rend d’abord à Dieu ce qui est à Dieu et aux hommes ce qui est aux hommes. Avec douceur, fermeté et conviction.



St Ignace priait ainsi :
Prenez Seigneur et recevez
toute ma liberté, ma mémoire, mon intelligence, et toute ma volonté,
tout ce que j’ai et possède.
Vous me l’avez donné: à vous Seigneur je le rends.
Tout est vôtre, disposez-en selon votre entière volonté.
Donnez-moi votre amour et votre grâce: c’est assez pour moi.

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