mardi 6 novembre 2012

Le Corps du Christ, Temple de Dieu - L'hypocrisie du don




ATTENTION / 2 HOMELIES : 9 & 11 novembre

9 NOV   DEDICACE LATRAN

“ Le Corps du Christ, Temple de Dieu ”

On aura beau vouloir fêter l'unité (!) de l'Église en rappelant la dédicace de la première basilique de Rome, au 6e siècle [alors que l'arianisme, qui niait la divinité du Christ, cessa de diviser les croyants]...
On aura beau comme les Juifs, à la dédicace du Temple, à Jérusalem, célébrer la réunion du peuple de Dieu...
On aura beau avec le prophète Ezéchiel constater que Dieu avait quitté le Temple à cause des fautes de son peuple, mais qu'il reviendra y établir sa demeure...



Si la liturgie, pour la dédicace d'une église, choisit l'évangile où Jésus annonce la fin de la gloire du Temple,  ce n'est pas sans signification!

Et tout d'abord Jean distingue ici deux “temples”: ieron, c'est l'ensemble de l'édifice avec ses cours, ses portiques et ses parvis; naos, c'est le sanctuaire (voir l'Exode 25, 8) où réside la “Présence” divine, appelée en hébreu la “Shekinah”. La traduction française du Lectionnaire a traduit l'un et l'autre indifféremment: alors que Jésus parle ici du naos, qui est le lieu de la Présence de Dieu.

L'édifice de pierre est ici relégué au second rang: eh bien, Dieu n'habitera plus ce sanctuaire à la toiture d'or fin qui fut l'un des plus beaux joyaux de l'Antiquité [et qui sera incendié accidentellement par les armées de Titus, en l'an 70].

D'autre part, Jean présente Jésus comme un homme ardent, qui ne laisse personne indifférent. Dans une scène d'une rare intensité, le Messie purifie le Temple fait de main d'homme pour en édifier un nouveau, qui ne sera pas fait de main d'homme (Marc 14, 58), car Dieu lui-même a choisi d'habiter, non plus dans un tel palais somptueux, mais au milieu du peuple qu'il fait sien.

... Mais si le lieu de sa Présence sera désormais l'Église - le Corps du Christ ressuscité, où seront rassemblés des gens venus des quatre coins de la planète  -, la question est en ces jours qui sont les nôtres : Où est l'Eglise?



C’est le diagnostic que faisait en 1958 le professeur Joseph Ratzinger, peu d’années avant l’ouverture du Concile[1]. L’Église s’est transformée en une communauté de païens qui ont cessé de croire. Les chrétiens ont perdu la conscience sur l’existence de la mission… Selon les statistiques, la vieille Europe continue à être un continent chrétien dans sa presque totalité. Mais les statistiques sont trompeuses. L' Europe, chrétienne de nom, assiste depuis 400 ans [Descartes], à la naissance d’un nouveau paganisme, qui se développe jusque dans le cœur de l’Église et qui menace de l’évider de l’intérieur. Le visage de l’Eglise des temps modernes est conforme à l’apparition d’une forme complètement nouvelle d'Église de païens, et le sera plus encore dans le futur: non pas, comme avant, une Église de païens convertis au christianisme, mais une Église de païens qui se nomment encore eux-mêmes chrétiens. Le paganisme est présent aujourd’hui dans l’Église elle-même et c’est un signe à la fois de l’Église de nos jours et du nouveau paganisme. L’homme d’aujourd’hui peut donc présupposer comme normalité la non-croyance du voisin... [...]

Alors que doit être l'Eglise? Le Herr Professor continuait:

L’Église est une communauté de croyants, d’hommes qui ont pris une décision spirituelle déterminée, et qui ainsi se différencient de ceux qui se refusent à prendre cette décision. Déjà à l’époque médiévale
[Moyen Âge], cela a commencé à changer, dans le sens où l’Église et le monde se firent basiquement identiques, par le fait que le christianisme n’était déjà plus fruit d’une décision propre, mais une réalité politico-culturelle donnée. Aujourd’hui, la couverture extérieure de l’Église demeure, tandis qu’ont diminué la conviction personnelle, le désir d’appartenir à l’Église... C'est pourquoi il est compréhensible qu’aujourd’hui la question se pose souvent avec force de savoir si l’Église ne doit pas être de nouveau transformée en une communauté de foi, pour lui rendre son aplomb. Cela signifierait renoncer à (certaines) positions ... toujours dangereuses, parce qu’elles s’interposent sur le chemin de la vérité.
À la longue, l’on ne pourra économiser le fait que l’Église se dépouille, pièce après pièce, de (certains ) des éléments ...et des apparences, pour éviter de se diluer dans le monde, et revenir à ce qu’elle est : une communauté de croyants."

Aux chrétiens d’aujourd’hui, il paraît impensable que le christianisme, et plus concrètement l’Église catholique, soit le seul chemin de salut: son caractère absolu s’est transformé en "quelque chose qui peut être mis en question". Personne ne peut croire que l’homme "prochain" va aller en enfer seulement parce qu’il n’est pas catholique pratiquant. L’idée que tous les hommes bons se sauveront est maintenant, pour le chrétien "normal", évidente, comme l’était avant la conviction contraire. Le croyant pratiquant se demande alors un peu désorienté : Pourquoi est-ce si "facile" pour ceux qui sont à l’extérieur, quand à nous on nous impose des choses si difficiles ?

On en arrive ainsi à percevoir la foi comme une charge et non pas comme une grâce.
C'est oublier que les uns et les autres ont leur chemin de salut, qui est différent, sans rompre l’unité du chemin: on ne peut comprendre cela que lorsqu’on a saisi que le salut de l’homme réside dans le fait qu’il est aimé de Dieu, et que sa vie, finalement, se trouve dans les bras de l’amour infini. Sans cela, tout le reste est vide.
Le Christ Jésus est en lui-même le salut de tous, car il est à la fois Dieu et homme! Cela vaut pour ceux qui croient en lui comme pour les autres, même s'ils n'y croient pas: cela ne change rien à la nature du salut! Voilà LA foi! Il est ainsi pour nous tous le lieu du salut.



Le salut de l’homme n’est pas une question d’autojustification, mais une justification par la grâce gratuite de Dieu. Il n’y a pas deux manières de se justifier, mais deux moyens d’être choisis par Dieu, et ces deux moyens de choix de la part de Dieu sont un seul chemin de salut de Dieu dans le Christ et en son Église qui repose dans la relation de ceux qui croient (le petit nombre) avec ceux qui ne croient pas (le plus grand nombre).

Mystère de l'Eglise! 


11 NOV   32EME DIM
“L'hypocrisie du don”


Jésus sait être ironique, et même cinglant! On se demande bien de qui il tient!



Il tacle surtout les hypocrites, les orgueilleux, les vaniteux, les prétentieux :  tous les imposteurs! Ceux qui, sous prétexte de "science" et de "richesses", ou de leur place dans la société profane ou religieuse, cherchent la considération, dirigent et jugent les autres. Cela vaut à l'envers pour les anticléricaux et les contempteurs de la foi, du droit et de la justice!

Ce que reproche Jésus aux chefs spirituels de son temps? C'est leur incohérence et leur duplicité, leur mensonge: mais n'est-ce pas actuel? “Ils disent et ne font pas.” Leur paresse :“Ils lient de pesants fardeaux... mais ne veulent pas les remuer du doigt.” Leur vanité: “Ils agissent toujours pour être remarqués des hommes... Ils aiment les places d'honneur... les premiers rangs... les salutations sur les places publiques.”

"Pipolisation", "Fame", "Médiatisation"...

Les scribes et les pharisiens de l'époque ne sont pas les seuls à se qualifier de la sorte : bien des baptisés aujourd'hui - et à tous les niveaux: évêques et prêtres compris -, pourront s'y reconnaître. Et si par malheur nous avons éprouvé de la satisfaction devant les propos de Jésus en pensant intérieurement: “Moi, je ne suis pas de ceux-là”, alors, dès cet instant, nous en sommes! D'ailleurs, qui d'entre nous ne s'est jamais réjoui de voir condamner les erreurs des autres? La paille et la poutre...

Ce reproche est tellement universel, et tellement humain, que nous y avons notre grade, chacun à sa manière. Le pire aveuglement n'est-il celui qui nous voile nos propres incohérences? Et Dieu sait si...

Dans le Royaume nouveau, personne n'est maître de qui que ce soit  et nul ne doit dominer un autre : nous sommes soeurs et frères. Personne n'est père, personne n'enfante les autres: tous sont enfantés de et par Dieu. Aucun n'est docteur et personne n'enseigne: tous sont enseignés par le même Esprit. Ainsi la hiérarchie nouvelle ne repose ni sur la science, ni sur la compétence, ni sur la domination, ni sur le sexe, mais sur le service de ceux et celles, en particulier, qui n'ont pas accès à leur juste part de bonheur...



La veuve ainsi a donné très peu. Mais Jésus ne se laisse pas impressionner par les "gros" dons; il est (extra)lucide, il voit au fond des cœurs: Amen, je vous le dis: cette pauvre veuve a mis dans le tronc plus que tout le monde. Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence: elle a tout donné, tout ce qu'elle avait pour vivre.

[On comprend pourquoi le conflit qui oppose Jésus aux chefs du Temple est allé s'amplifiant et le conduira bientôt à la mort sur la croix. Rappelons que dès la destruction du Temple, en l'an 70 de notre ère (Jésus est "parti" depuis une génération), les pharisiens ont tenu une assemblée à Jamnia (Javné) et exclu de leurs synagogues les chrétiens convertis du judaïsme. Cet événement, entre autres, a sans doute ravivé le souvenir des paroles de Jésus consignées ici vers cette époque.]

Accordé par Dieu à certains, le don de générosité est la capacité spéciale de partager ses ressources matérielles avec joie et libéralité. Les gens ayant ce don:
  • gèrent leurs finances et réduisent leur train de vie pour pouvoir donner autant que possible;
  • consentent des dons de sacrifice;
  • subviennent aux besoins tangibles, de façon à permettre la croissance spirituelle des êtres humains;
  • fournissent des ressources de divers types, généreusement et avec joie, ayant confiance que Dieu pourvoira à leurs propres besoins;
  • peuvent avoir une capacité spéciale de faire fructifier l’argent, leur permettant de mettre cette récolte au service des autres.


En général, le croyant ayant ce don est:
  • Charitable
  • Responsable
  • Ingénieux
  • Discipliné
  • Redevable
  • Consciencieux
  • Généreux
  • Prévoyant
parce qu'il estime ce don, se rappelant que l’offrande d’argent et de ressources est aussi une contribution spirituelle et qu'il doit se prémunir contre l’envie et la cupidité.



[1] Le conférence portait le titre « Les nouveaux païens et l’Église » et a été publiée par la revue « Hochland » en octobre de cette année-là. L’agence autrichienne « Kath.net » récupère ce texte, très utile pour comprendre aujourd’hui pourquoi le Pape convoque une Année de la foi.


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