dimanche 5 septembre 2010

Partir Revenir

12 septembre 2010
24ème dimanche du temps ordinaire - Année C

Partir Revenir



Références des textes
1. Exode 32,7-11.13-14
2. Psaume 50
3. 1 Timothée 1,12-17
4. Luc 15,1-32


Si Exode 32 commence par nous traiter de peuple à la tête dure, c’est qu’il ne nous reste plus qu’à chanter avec le Psaume 50 pour que Dieu crée en nous un coeur pur.
Voilà en effet que nous nous sommes déplacés, pour nous vouer peut-être au culte de quelque veau d’or, fruit de ce génie multiple que sont notre intelligence et notre savoir faire, reçus à notre venue sur terre : adoration du profit, de la notoriété, de tous les produits de nos sciences et de nos techniques, du sexe, du pouvoir, tout ce qui finira par nous trahir un jour ou l’autre. Mais nous nous en fichons royalement, la plupart du temps, tant que cela dure en tout cas…

Qui peut deviner – comme moi qui écris ces lignes -, que je suis en train de me servir de mon ordinateur pour la dernière fois ? Que demain je conduirai pour la dernière fois ma voiture, en allant sur la Croisette faire mon footing quotidien ? « Insensé, cette nuit même on va te redemander ton âme ».

Alors faut-il attendre ce « vrai » retour, le dernier, pour « faire quelque chose » ?



Dans les deux premières paraboles de Luc (en transposant : le fils fugueur et l’euro perdu !), peut-être peut-on noter comme une apparente contradiction. Qu’il s’agisse de la brebis égarée ou de l’argent perdu, ces deux biens retrouvés ne prennent aucune initiative : ils se laissent « simplement » retrouver ! C’est le berger et la propriétaire qui font tout le travail. Les voici tous les deux totalement absorbés par le centième (100 bêtes) et le dixième (dix pièces) de leur avoir, comme si les biens conservés (99 bêtes et 9 pièces) ne les avaient soudain plus intéresser autant !
Il apparaît que le dieu que Jésus nous raconte semble n’avoir d’intérêt (avant tout ?) que pour ceux qui sont ou se sont perdus.
Et voici que la morale (comme on disait du temps on où apprenait par cœur les Fables de Lafontaine !) consiste, pour ce prêcheur itinérant, à assimiler ceux que Dieu s’en va chercher de par les chemins du monde, sont tous des pauvres bougres, paumés malgré eux - et tout le monde peut l’être un jour ou l’autre, et de bien diverses façons ! -, et voici que Jésus les compare aux pécheurs qui se convertissent !

Alors, c’est Dieu qui les retrouve ou bien c’est eux qui retournent vers Dieu ?
Les deux, certainement, mon capitaine !

Tout le monde la voit, cette chèvre impossible qui n’obéit ni au berger ni aux chiens - ce garçon, cette fille, qui s’en vont avec leurs copains, fréquenter des lieux mal famés, habillés comme l’as de pique avec un jean qui leur tombe au bas des fesses et un string qui doit sortir du pantalon !
C’est votre (petit) fils, c’est votre (petite) fille que Dieu (qui donc, sinon lui ?) va chercher aussi loin qu’ils s’en sont allés … Mais encore faut-il qu’il aient gardé au fond de leur cœur, l’écho de votre voix et de tous vos conseils qu’ils ont fort bien entendus et enregistrés, même s’ils ne les ont pas suivis… jusqu’ici…
Car soudain, il y a la peur, la peur au ventre, la peur de ne plus savoir comment s’en sortir… Alors – grâce à Dieu ! -, résonne la mémoire de l’amour sans condition, s’il en ont fait seulement l’expérience, un jour, quand ils étaient « petits » !



Car il faut allier notre liberté à ces retrouvailles ! « Faut’l’vouloir ! ». Dieu est bien le dernier à rien faire pour nous malgré nous. Se convertir - c’est-à-dire reprendre la « bonne » direction -, c’est accepter de se retrouver d’abord soi-même, sa propre vérité, qui est image et ressemblance – souvent défigurée -, du visage même de ce Dieu, venu nous rendre visite par ce Jésus dont il est le Père, et le nôtre si nous le voulons !

C’est pourquoi l’histoire du fils « prodigue » vient compléter le tableau comme il faut, en nous racontant que, justement, ce retour à Dieu et à son Père comporte un déplacement de notre part. Car ce fils cadet (toujours le plus petit !) choisit la liberté, certes ! Fini le travail dans le domaine familiale ; à lui l’argent de l’héritage anticipé dont il disposera à sa (pauvre et coûteuse) guise. C’est bien au nom de cette liberté que beaucoup ont rejeté et rejettent encore le Jésus de la foi !
Est-ce être libre que de se plier à des lubies, des modes et des « n’importe qui » qui propagent les maladies du « n’importe quoi » ?
Rien ne peut rendre plus esclave que le laisser-aller confondu avec la liberté ! C’est ce qu’on appelle l’aliénation, et les malades, des aliénés !

Alors vive la liberté sauvage, Into the Wild ! Allons-y ! Et quand on a «faim et soif » à en crever, quand notre corps et notre cœur crient ensemble famine, la moindre bouchée, la moindre parole peuvent devenir mortelles, si on ne sait plus quoi manger ni quoi boire, ni qui croire !

Il semble que l’homme doive arriver à toute extrémité pour relire son itinéraire, et comparer la vie qu’il mène à la prospérité qu’il a perdue et qui n’attend que lui ! C’est parfois ce qui va motiver son retour. Y a –t-il de mauvaises raisons pour revenir… à la vie ? … Le ventre ? L’amour ? La peur ? … TOUT est bon quand l’enjeu est de se remettre à vivre ! Jésus nous fait comprendre que nous sommes des êtres de besoin, d’insuffisance, et que nos « idoles » ne peuvent nous faire vivre.

Se déplacer pour rentrer entraîne tout un décentrement et un re centrement !



Tout le monde se déplace. L’un court vers l’autre : pour demander pardon ou pour pardonner !

La « morale » de nouveau est simple !
Pour peu que je me « déplace » vers Dieu ou loin de lui, Dieu se met à courir vers moi, se tient en vue et attend. On (Jésus) nous apprend que peu lui importent les raisons, bonnes ou mauvaises, qui m’ont poussé à m’éloigner de lui ou maintenant à revenir vers lui !
Regarde-le !
Il ne laisse même pas le prodigue terminer sa « confession » !
Il l’embrasse à l’étouffer !
Ah Dieu est comme çà : quand il aime, il aime ! Et il fait la fête !
Il réhabilite, il recrédite, il restaure : et il ne veut plus en entendre parler ! Quoi qu’en pensent les autres, et même son autre fils aîné qui n’y comprend rien, qui l’a mauvaise, et qui se tait ! Parce qu’il ne peut même pas imaginer que son père, Dieu, pardonne tout, même son irritation devant sa miséricorde.

Voilà donc trois histoires qui finalement ne parlent de perte que pour se réjouir à la fin ! « Mon fils était perdu et il est retrouvé, il était mort et il est revenu à la vie ».