7 OCT
27 DIM
Le
légal et le moral
Il faut (re)lire Deutéronome
24,1-5
24.1 Lorsqu'un homme aura pris et épousé
une femme qui viendrait à ne pas trouver grâce à ses yeux, parce qu'il a
découvert en elle quelque chose de honteux, il écrira pour elle une lettre de
divorce, et, après la lui avoir remise en main, il la renverra de sa maison.
24.2 Elle sortira de chez lui, s'en ira,
et pourra devenir la femme d'un autre homme.
24.3 Si ce dernier homme la prend en
aversion, écrit pour elle une lettre de divorce, et, après la lui avoir remise
en main, la renvoie de sa maison; ou bien, si ce dernier homme qui l'a prise
pour femme vient à mourir,
24.4 alors le premier mari qui l'avait
renvoyée ne pourra pas la reprendre pour femme après qu'elle a été souillée,
[…]
24.5 Lorsqu'un homme sera nouvellement
marié, il n'ira point à l'armée, et on ne lui imposera aucune charge; il sera
exempté par raison de famille pendant un an, et il réjouira la femme qu'il a
prise
C’est donc Moïse qui a donné cette
loi aux fils d'Israël ! Dans la traduction du Grand Rabbin Zadoc Khan.
Éditions Sinaï. 1994, le 1er verset donne :
Lorsqu'un homme aura pris
et épousé une femme
qui viendrait à ne pas
trouver grâce à ses yeux,
parce qu'il a découvert en
elle quelque chose de honteux,
il écrira pour elle une
lettre de divorce, et, après la lui avoir remise en main, il la renverra de
sa maison.
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Quand
un homme aura pris une femme et cohabité avec elle;
si
elle cesse de lui plaire
parce
qu'il aura remarqué en elle quelque
chose de malséant,
il
lui écrira un libelle de divorce, le lui mettra en main, et la renverra de
chez lui.”
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Mais quel est ce quelque chose de honteux/malséant? Les rabbins ne tombent pas d’accord là-dessus : on trouve les opinions divergentes des deux écoles dans la Mishna, une collection de loi orale et de discussions légales complétée vers 210 de l'ère commune, et qui forme la base du Talmud.
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Selon Rabbi Shammaï, il s'agissait d'une
faute grave, comme l'adultère.
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Pour l'école moins rigoureuse de Rabbi
Hillel l'Ancien – qui a présidé le sanhédrin pendant 20 ans, de l'an 10 avant
J.-C. à l'an 10 après J.-C. et qui eut Rabbi Shammaï pour collègue et pour
adversaire - tout servait de prétexte au
divorce, comme... d'avoir laissé brûler un repas !
On le voit bien: tout ce qui est
légal n'est pas forcément moral! Voilà donc le piège tendu à Jésus de Nazareth.
Contredira-t-il Moïse? Piège en forme de
« double bind » : quelle que soit sa réponse, il perdra sans
doute un bon nombre de ses disciples.
Que les pharisiens, généralement rigoristes, aient choisi d'insister ici sur la liberté de choix, dans le but évident de discréditer Jésus, est une chose ! Mais si Marc le souligne depuis Rome 40 ans plus tard, c’est que la loi romaine, elle, permettait - déjà à l’époque de Jésus -, aussi bien à la femme qu’à l’homme de divorcer !!! Cela nous aide à saisir l'enseignement du Christ, transcrit et transmis dans ce contexte : il demande la même fidélité en deux phrases, l'une au masculin et l'autre au féminin.
Sa réponse s'appuie sur le projet initial du Créateur. Il semble clair que Moïse, comme premier éducateur du peuple de Dieu, avait retenu en bonne partie le droit coutumier des peuples d'alentours, comme le code d’Hammourabi (1750 avt JC). . [La loi du talion, qui modère les représailles et que l'Ancien Testament répète trois fois, Ex 21, 24; Lév 24, 20; Deut 19, 2 en est un bon exemple.] Jésus enseigne, pour sa part, le pardon sans condition :
si un vase précieux se brise, on ramasse les morceaux; eh bien, la personne humaine est bien plus précieuse que le vase le plus précieux. Le Christ accueille avec affection celles et ceux qui ont vécu un si douloureux échec. Ce que bien des disciples ont encore du mal à accepter.
Oui, explique-t-il : la loi
de Moïse qui facilitait le divorce était due à notre dureté de cœur ! Le mot grec – employé par Marc -, est une belle image biblique: la
« sclérocardia ». La sclérocardie, la sclérose du cœur !
Il nous est toujours plus facile
de juger que d'aimer, quand le cœur est si loin de celui de Dieu ! Car
selon le projet initial — la première lecture le rappelle — nous sommes
- créés homme ET femme,
- à l'image de Dieu,
Et s’il est vrai – et que nous le
croyons -, que nous sommes destinés à vivre éternellement dans l'intimité de
Dieu lui-même, alors aussi bien vivre déjà d'un amour fidèle et attentif comme
le sien.