28 OCT 30EME DIM
Mon Maître, que je voie!
Si on veut bien garder présent à l'esprit que les évangiles ont été écrits quelque 40 et 50 ans après le départ de Jésus, on doit penser en stéréo en les lisant : ils racontent/rapportent un évènement ou un enseignement, certes, mais dans la conjoncture historique de leur élaboration. Et c'est tout l'art du rédacteur que de respecter cette distance critique entre l'Histoire (l'évènement historique) et l'histoire (le script rédactionnel) : ce que l' allemand distingue entre "Historie" et "Geschichte".
L'épisode marcien de ce matin
ressemble au script d'un court métrage (comme la résurrection de la fille de
Jaïre, la mort de Jean Baptiste ou l'entrée triomphale à Jérusalem, qui suit
immédiatement le texte d'aujourd'hui). Nous sommes à pied d'œuvre - c'est le
cas de le dire: au terme de la montée à Jérusalem, la deuxième grande section
de saint Marc.
Images soignées, Marc
l'évangéliste style "Paris-Match" va faire dans la symbolique à la
Robert Bresson. Ainsi le mendiant aveugle, laissé seul en dehors de la ville,
sera l'icône même de la pauvreté la plus misérable : il ne peut rien faire et
il est pathétiquement dépendant des passants.
Or, dans les versets qui précèdent, Jésus a parlé du baptême dans sa mort et dans sa vie nouvelle. Le "relèvement" de l'aveugle y fait écho, car en filigrane il traite aussi du baptême qui marquait le passage des ténèbres à la lumière chez les premiers chrétiens. (N'oublions pas que Jéricho veut dire "la cité de la lune": il s'y trouvait vraisemblablement un culte aux divinités de la nuit. Les baptisés, eux, devenaient enfants de lumière).
Une fois baptisé et disciple à son tour, l'ex aveugle pourra “marcher avec Jésus sur la route.”
Lisons "en stéréo". L'aveugle est donc assis "au bord" du chemin, "à la limite" de la ville: il était exclu ("ex-communié") du joyeux cortège des disciples. Le script suppose qu'il a déjà entendu parler de Jésus même s'il n'a jamais vu son visage, et pour cause. Il ne veut qu'une chose : sortir de ses ténèbres et de son isolement pour faire partie de la communauté des citoyens, entendez de grande famille du Christ.
Or, dans les versets qui précèdent, Jésus a parlé du baptême dans sa mort et dans sa vie nouvelle. Le "relèvement" de l'aveugle y fait écho, car en filigrane il traite aussi du baptême qui marquait le passage des ténèbres à la lumière chez les premiers chrétiens. (N'oublions pas que Jéricho veut dire "la cité de la lune": il s'y trouvait vraisemblablement un culte aux divinités de la nuit. Les baptisés, eux, devenaient enfants de lumière).
Une fois baptisé et disciple à son tour, l'ex aveugle pourra “marcher avec Jésus sur la route.”
Lisons "en stéréo". L'aveugle est donc assis "au bord" du chemin, "à la limite" de la ville: il était exclu ("ex-communié") du joyeux cortège des disciples. Le script suppose qu'il a déjà entendu parler de Jésus même s'il n'a jamais vu son visage, et pour cause. Il ne veut qu'une chose : sortir de ses ténèbres et de son isolement pour faire partie de la communauté des citoyens, entendez de grande famille du Christ.
Il est aveugle, mais pas sourd :
il entend maintenant de ses propres oreilles le squad des disciples qui
approchent, et on n'a pas plutôt prononcé le nom du Nazaréen qui passe, qu'il
se met à hurler: “Jésus, fils de David, aie pitié de moi!” (C'est le célèbre Kyrie eleison, que l'on répétait dans la liturgie
primitive). Des gens cherchent vainement à le faire taire, comme le
faisaient les adversaires de la première génération chrétienne. Ce qui le fait
hurler d'autant plus fort!
Jésus s'arrête, et tous avec lui! Puis aux disciples : “Appelez-le.” Car ce sera leur mission essentielle que d'interpeller quiconque "au nom de Jésus", en prononçant la parole qui remet debout: “Égeiré: lève-toi; éveille-toi; reviens à la vie!” (Le verbe "egeirô" signifie "faire se lever, réveiller ou ressusciter". On se souvient de la même phrase de Jésus à la belle-mère de Pierre, puis à la petite fille de Jaïre, en araméen: “Talitha cumi").
Et c'est là que
l'"idée" (marcienne? historique?) illumine toute la scène! Exactement
le verset 50 du chapitre 10:
- L'aveugle jeta son manteau, et, se levant d'un bond, vint vers Jésus.
- Ὁ δὲ ἀποβαλὼν τὸ ἱμάτιον αὐτοῦ ἀναστὰς ἦλθεν πρὸς τὸν Ἰησοῦν.
- Qui, proiecto vestimento suo, exsiliens venit ad Iesum
Qu'il jette de côté son manteau,
soit! Mais comment un aveugle peut-il "bondir" et tomber juste aux
pieds de quelqu'un qu'il ne voit pas? D'UN BOND DANS LA BONNE DIRECTION ET JUSQU'AU BUT! D'autant plus qu'il ne
devait pas se trouver très près, puisqu'il "gisait" au bord de la
route et qu'il hurlait pour qu'on l'entende!
Quant aux versets 51 et 52, ils
ne peuvent/doivent pas être lus/compris "dans le futur):
- What can I do for you?
- Let me see, Sir!
- OK, your faith healed you!
MAIS:
-
Jésus : Τί θέλεις ποιήσω σοί; [MAIS] QUE VEUX-TU QUE JE
FASSE [ENCORE] POUR TOI?
-
L' (ex) aveugle : Ῥαββουνί, ἵνα
ἀναβλέψω. MON PETIT MAITRE, "DES-AVEUGLE- "MOI!
-
Jésus : ἡ πίστις σου σέσωκέν σε. [MAIS
] TA FOI T'A [DEJA] GUERI!
- Car c'est au moment même où il décida de se rendre auprès de Jésus (de le suivre donc) que sa cécité disparut!
- D'ailleurs Jésus lui pose en fait une question baptismale: “Que veux-tu que je fasse pour toi?” ce qui équivaut à dire: “Veux-tu ouvrir les yeux et être baptisé?” Et quand l'ex-aveugle lui demande la lumière (de la foi) : " Maître, que je voie!”, il n'y a pas de "Amen!".
- Comme au baptême on ne dit pas "Amen!" après le rite de l'eau : PARCE QUE L'ACTE LUI MEME SUFFIT : EX OPERE OPERATO, par le fait même!
Guéri par sa foi, et accueilli
dans la communauté des croyants, il accompagne désormais Jésus sur la route.
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